La loi sur le référendum adoptée au Soudan

15-12-2011 09:05 AM

Abdel Massih Felli


La loi électorale nécessaire à la tenue d’un référendum sur l’indépendance du sud du pays a été adoptée cette semaine par le parlement soudanais, après avoir adopté des amendements sur lesquels les deux principaux partenaires au gouvernement étaient convenus. Le Parti du Congrès National (NCP) et le Mouvement de Libération du Peuple Soudanais (SPLM) avaient convenu d’introduire deux amendements au projet de loi. Le premier amendement stipule que tous les Soudanais nés après janvier 1956 devraient avoir le droit de voter dans n’importe quel bureau de vote, que ce soit dans le sud ou dans le nord du Soudan.

Le second prévoit des consultations entre le NCP et le SPLN sur les arrangements pour la période après la séparation du Sud-Soudan au cas où les habitants du Sud choisiraient l’indépendance dans le référendum du 2011. La loi cruciale sur le référendum d’autodétermination prévu en 2011 au Sud-Soudan, élaborée au fil de plusieurs mois de difficiles tractations, a été adoptée mardi par le Parlement soudanais après un accord entre nordistes et sudistes sur un article controversé.

La nouvelle législation intègre un article réclamé par le Mouvement de libération du peuple du Soudan (SPLM, ex-rebelles sudistes) et supprimé par le Congrès national du président Omar el-Béchir lors du premier passage de la loi devant le Parlement. Cet article stipule que les Sud-Soudanais résidant en dehors du Sud semi-autonome et nés avant le 1er janvier 1956 (date de l’indépendance du Soudan) doivent voter dans le Sud. Les sudistes veulent pouvoir vérifier leur identité, craignant en outre d’éventuelles fraudes ou une manipulation de leur vote s’ils votent ailleurs que dans le Sud. Les Sud-Soudanais n’habitant pas au Sud mais nés après le 1er janvier 1956 pourront en revanche voter sur leur lieu de résidence, dans le Nord ou à l’étranger.

Il y a une semaine, le Parlement avait approuvé cette loi fixant les modalités du référendum qui doit décider d’une éventuelle sécession du Sud-Soudan. Mais le SPLM et les autres partis sudistes avaient protesté contre la suppression à la dernière minute de cet article sur lequel ils s’étaient pourtant mis d’accord avec le Congrès national. Selon ce dernier, l’article contrevenait à la Constitution intérimaire, qui prévoit la “liberté de mouvement” de tous les Soudanais. “L’amendement (de mardi) n’a été introduit que pour donner aux frères sud-soudanais plus d’élan pour qu’ils votent pour l’unité du Soudan lors du référendum”, a déclaré Ibrahim Ghandour, député et haut responsable du Congrès national. “C’est un nouveau jour pour l’établissement de la confiance. Le peuple du Sud mérite le droit au référendum et plus encore”, a pour sa part affirmé Yasser Arman, le président du groupe parlementaire du SPLM.

Aux termes de la nouvelle loi, l’indépendance du Sud-Soudan sera reconnue si le “oui” atteint 51%, avec une participation de 60%.
Le nord du Soudan, majoritairement musulman, et le sud, en grande partie chrétien et animiste, ont signé en 2005 l’Accord de paix global (CPA), qui a mis fin à une guerre civile de plus de 20 ans à l’origine de deux millions de morts. Le CPA prévoit d’organiser en 2011 deux référendums. L’un demandera si la région d’Abyei garde son statut spécial au sein du Nord ou si elle est intégrée au Sud. Au même moment, le Sud organisera un référendum distinct sur son indépendance. Beaucoup au Sud-Soudan espèrent un “oui” au vote sur l’indépendance et souhaitent ramener dans le giron sudiste la plus grande surface possible des terres pétrolifères d’Abyei. Le Nord, lui, ne veut pas perdre le contrôle de ces précieuses ressources. En vertu du CPA, le Congrès national détient 52% des sièges à l’Assemblée nationale, le SPLM 28%, les autres partis nordistes 14% et les petits partis sudistes 6%.

Ce référendum est l’un des points clefs de l’accord de paix global (CPA), signé en 2005. Le texte, négocié sous l’égide de la communauté internationale, a mis fin à un quart de siècle de guerre civile entre un Nord majoritairement arabe et musulman et un Sud africain à dominante animiste ou chrétienne. Les combats ont fait deux millions de morts, pour la plupart civils. Outre ce vote, le CPA prévoit, pendant une période de six ans, un gouvernement d’union nationale, un tracé précis de la frontière nord-sud, des élections générales et un partage des richesses pétrolières. Mais cinq ans plus tard, la paix est loin d’être gagnée. Les récentes tensions au Parlement n’en sont que le signe le plus évident. « Le problème est que le gouvernement nordiste fait tout pour enrayer le fonctionnement de l’accord », affirme même Monien Aljack, un militant des droits de l’Homme soudanais. La liste des ratés du CPA est longue. Le gouvernement d’union est demeuré purement formel. La frontière reste à définir, notamment autour des monts Nuba et des régions d’Abyei ou de Blue Nile, des zones contestées car riches en pétrole, en eau et en pâturages.

Les sudistes, déjà largement autonomes, semblent avoir entériné cet échec et se préparer à l’indépendance en 2011. Au printemps dernier, Salva Kiir, le président sud-soudanais, s’est même prononcé en faveur de la partition. La stratégie adoptée par Khartoum reste officiellement moins claire. Mais l’hostilité du NCP à un départ du Sud, où se trouvent les plus importantes réserves d’or noir du pays, n’est pas un secret.

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