La coopération pour le partage des eaux du Nil

15-12-2011 09:05 AM

Abdel Massih Felli Michael Victor


L’Egypte a rejeté l’accord signé en Ouganda, entre quatre pays riverains du Nil pour se partager les eaux de ce fleuve, il y a quelques jours. Réunis à Entebbe, l’Ouganda, l’Ouganda, l’Éthiopie, le Rwanda, la Tanzanie et l’Ouganda, ont décidé de mettre sur pied une commission chargée de gérer les projets d’irrigation, les canaux ou barrages, sur la totalité des 6.700 km du Nil. Ayant refusé de participer à cette réunion, le Caire menace de prendre les mesures légales et diplomatiques necessaires, pour défendre ses droit, selon Mohammed Allam, ministre égyptien des Ressources hydrauliques.  Cet accord est en négociation depuis une dizaine d’années entre les neufs pays riverains du fleuve pour un partage plus équitable de ses eaux. Mais le Burundi et la RD du Congo étaient absents. Et l’Égypte et le Soudan, farouchement opposés à ce projet, ont boycotté l’accord. L’Egypte bénéficie depuis 1929 d’un quasi monopole sur l’exploitation des eaux de ce fleuve immense. A cet égard, l’Ouganda, l’Ethiopie, le Rwanda et la Tanzanie ont décidé de mettre fin à l’initiative du bassin du Nil, fondée en 1999, avec l’aide de la banque mondiale, pour tenter d’apaiser les tensions entre les pays riverains. Rejeter les anciens traités Pour lui succéder, une commission a été créée. Une commission dans laquelle chaque état aura une voix égale. Cette cérémonie a été boycottée par l’Egypte et le Soudan. Mais le Major General Geoffrey Okanga, ambassadeur du Kenya en Ouganda, a souligné que son pays allait également signer cet accord: “Nous avons atteint un stade où nous pouvons enfin tous ensemble espérer assurer une protection et une utilisation adéquate de nos ressources en eau. Cela ne pourra avoir lieu que si nous nous mettons tous d’accord pour créer une institution capable d’imposer une exploitation équitable de nos ressources en eau dans tous les pays concernés”.  Le nouveau texte ne mentionne aucun chiffre, en volume ou mètres cubes, sur le futur partage des eaux, mais il “annule” les traités de 1929 et 1959. Il autorise les pays du Bassin à utiliser toute l’eau qu’ils jugent nécessaire, dans la mesure où ils ne portent pas préjudice aux autres pays de l’aval. Une Commission du Bassin du Nil sera en charge de recevoir et d’approuver tous les projets (irrigation, barrages, etc.) concernant le fleuve. Elle sera basée à Addis Abeba et comptera des représentants des neuf pays concernés. L’Egypte estime avoir des “droits historiques” sur le Nil et n’entend pas céder à cette pression. Elle rappelle que le fleuve lui fournit plus de 90% de ses ressources en eau et qu’il s’agit pour elle d’une question vitale. L’UE: Mauvaise idée La signature d’un accord séparé sur le partage des eaux du Nil, comme celui que projettent d’adopter sept pays d’Afrique de l’est sans l’Egypte ni le Soudan, n’est pas une “bonne idée”, a affirmé le représentant de l’Union européenne au Caire. “Ce n’est pas une très bonne idée que sept pays signent un document à ce stade”, a déclaré Marc Franco, chef de la délégation de l’UE en Egypte, interrogé sur ce sujet lors d’une conférence de presse. “Nous sommes préoccupés par le fait qu’il puisse y avoir une rupture en deux groupes” au sein des pays du bassin du plus long d’Afrique, a ajouté Franco, qui présentait l’édition 2009 d’un rapport annuel sur les relations UE-Egypte. Le diplomate européen a souligné la nécessité de ne pas ajouter une nouvelle source de tensions dans une région déjà fragilisée par les conflits dans la région des Grands Lacs, au Darfour ou encore au sud-Soudan. Il faut “reprendre le dossier et voir ce qui peut-être fait pour parvenir à un compromis”, a-t-il insisté, et “combler les écarts” pour ne pas “aggraver les problèmes politiques qui existent”. Le traité actuel de partage des eaux, conclu en 1929 entre l’Egypte et le colonisateur britannique, puis amendé 30 ans plus tard, attribue des quotas très favorables à l’Egypte (55.5 milliards de m3) et au Soudan (18.5 mds), soit au total 87% du débit du fleuve. Il octroie en outre au Caire un droit de veto sur tous les travaux susceptibles d’affecter le débit du Nil, qui fournit à l’Egypte 90% de ses besoins en eau. Pour Le Caire, il s’agit d’une question vitale.   
Offensive diplomatique de l’Egypte  L’Egypte a fait savoir mercredi qu’elle allait intensifier ses efforts diplomatiques pour préserver ses “droits historiques” sur l’utilisation des eaux du Nil, menacés par un nouveau traité signé par des pays africains en amont du fleuve. Le ministre de  l’Irrigation, Mohamed Allam, s’est envolé mercredi pour Khartoum, principal allié de l’Egypte dans ce dossier, a annoncé l’agence officielle égyptienne Mena. M. Allam et ses interlocuteurs soudanais ont discuté des “moyens de maintenir les droits des deux pays” . Ce dossier devrait également être au centre d’une visite de quatre jours au Caire, à partir de samedi, du Premier ministre du Kenya Raila Odinga, dont le pays a signé mercredi un nouveau traité plus avantageux pour les pays de l’amont, rejoignant l’Ethiopie, le Rwanda, l’Ouganda et la Tanzanie qui l’ont déjà paraphé vendredi dernier. Le Caire, selon la Mena, attend également le 29 mai une visite du président de la République démocratique du Congo (RDC) Joseph Kabila, et en juin du président du Burundi Pierre Nkurunziza. Ces deux pays de l’amont du bassin du Nil n’ont pour l’instant pas rejoint les signataires du nouvel accord. L’Egypte compte aussi dépêcher dans les prochaines semaines ses ministres de l’Agriculture Amine Abaza et des Investissements Mahmoud Mohieldine en Ethiopie et en Ouganda. L’Egypte se prévaut du fait que les accords actuels restent valables tant qu’ils ne sont pas modifiés à l’unanimité. Elle souligne aussi le caractère vital de ses droits sur un fleuve qui lui fournit 90% de ses besoins en eau, alors que les pays africains de l’amont bénéficient d’une pluviométrie bien meilleure que l’Egypte désertique.
Legende Image fournie par la NASA montre la partie nord du Nil, le 30 janvier 2001


 

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