L’assomption de la Vierge du Greco

23-08-2023 06:09 AM


L’Eglise copte orthodoxe célèbre le 16 Misra, correspondant au 22 août de chaque année, l’Assomption du corps de la toute pure sainte Vierge Marie. L’Assomption de Marie, appelée Dormition dans la tradition orientale, est la croyance religieuse selon laquelle la Mère du Christ, ne devait pas connaître la corruption du corps. Elle est donc entrée, corps et âme, directement dans la gloire de Dieu, ce qui est traduit par « montée au ciel ».

Le Synaxaire raconte les détails de cette histoire expliquant que tandis qu’elle priait auprès du Saint Sépulcre dans l’attente du moment joyeux où elle sera délivrée des liens charnels, l’Esprit Saint lui apprit qu’elle quittera rapidement ce monde périssable. Le moment venu, les apôtres et les vierges du mont des oliviers arrivèrent. Alors que notre Dame était étendue sur son lit, notre Seigneur vint, entouré d’un grand nombre d’anges, la consola et lui apprit quel grand bonheur lui était préparé. La Vierge en fût heureuse et, ayant tendu le bras, elle bénit les apôtres et les vierges présentes. Puis elle rendît l’âme entre les mains de son fils et son Dieu, Jésus-Christ qui l’éleva vers les demeures célestes.

Les apôtres embaumèrent son corps et partirent pour Gethsémani. En chemin, des juifs voulurent s’interposer et empêcher son enterrement. L’un d’entre eux attrapa le cercueil, alors ses mains se séparèrent de son corps et y restèrent attachées. Lorsqu’il crut et regretta son geste, ses mains reprirent leur place sur son corps par les prières des saints apôtres.

Or, Thomas l’apôtre n’était pas présent avec eux au moment de la Dormition de notre Dame. Il arriva au moment où elle fut enterrée et eut la vision du corps pur qui s’élevait vers le ciel soutenu par les anges. L’un d’entre eux lui dit : ” Dépêche-toi et embrasse le corps de la toute pure sainte Marie “. Il fit ce qui lui était demandé.
Ayant rejoint les autres apôtres, ils lui apprirent le départ de notre Dame. Il leur répondit : ” Je ne croirai cela que lorsque je verrai son corps. Vous savez que j’ai douté de la résurrection du Christ. ” Alors, ils allèrent avec lui au tombeau et l’ayant ouvert ils n’y trouvèrent pas le corps. Ils en étaient tous abasourdis. Alors Thomas leur raconta comment il avait vu le corps pur emporté par les anges vers le ciel. L’Esprit Saint leur expliqua que le Seigneur n’a pas voulu que le corps demeure sur terre.

Le Seigneur leur avait promis qu’ils la reverraient avec son corps. Ils attendirent l’accomplissement de cette promesse jusqu’au 16 Misra où ils la virent assise à la droite de son fils et son Dieu et entourée du chœur des anges. Ainsi s’accomplit la prophétie de David qui dit : ” La reine s’est tenue à la droite du Roi “.
C’est l’occasion de s’approcher de ce mystère par la présentation du tableau de Dominikos Theotokópoulos dit le Greco, né le 1er octobre 1541 à Candie, aujourd’hui Héraklion en Crète, que nous allons découvrir le sens de la fête de l’Assomption. Cette œuvre monumentale, restaurée en 2019, est le panneau central du retable réalisé par le Greco à la demande, en 1577, de Don Diego de Castilla, doyen de la cathédrale, pour le monastère de Santo Domingo El Antiguo de Tolède, fondé au 11e siècle pour le roi Alphonse VI. Terminée en 1579, cette immense huile sur toile, fait aujourd’hui partie de la collection de l’Art Institute of Chicago.

Greco a peint la montée au Ciel de la Vierge Marie. L’événement de sa Dormition, qui ne ressemble à aucune autre car exempte de douleurs, est représenté avec des couleurs lumineuses (du bleu – du jaune – du rose – du vert). Selon la Tradition des Pères de l’Eglise, les Apôtres, dispersés à travers le monde pour annoncer l’Évangile, sont miraculeusement réunis autour du tombeau de Marie. Ils ont la surprise de le trouver vide et assistent, au son des Cantiques, à l’élévation dans le Ciel, soutenus par des anges, de Son corps et de Son âme.

Le tableau se divise en deux parties. La partie inférieure représente le tombeau vide ; sa perspective montante symbolise le miracle qui vient d’avoir lieu. Les Apôtres, sont répartis en groupe de six. Visages et attitudes reflètent interrogation et perplexité devant ce qui vient de se produire. Certains semblent prier. D’autres suivent du regard Marie. Le doigt de l’un d’eux, pointé vers Elle, attire notre regard et paraît nous indiquer quelle voie suivre pour « atteindre » le ciel.

Sur la partie supérieure, Marie est vue en contreplongée. Les bras grands ouverts, les yeux levés vers le ciel, elle est accompagnée dans les nuées par six anges aux postures diverses et par des quelques chérubins ; ce terme serait d’origine assyrienne. Dans cette langue « kéroub » ou « karibu » signifierait « celui qui prie » ou « celui qui communique ». Les pieds de la Vierge reposent sur un croissant de lune. Il délimite le monde de la terre, corrompu par le péché, et l’espace pur du monde divin. Les nuages, eux aussi, séparent le monde d’en haut et celui d’en bas.

A sa droite, l’ange vêtu de rose, un bras délicatement passé sous celui de Marie, semble l’aider dans son ascension vers le ciel. A sa gauche, le visage de l’enfant habillé de jaune (le seul qui regarde en direction du visiteur) crée un lien entre le monde terrestre et le monde céleste. Son regard, qui fixe le spectateur, est comme une invitation à y pénétrer.

Ce tableau, grâce à ses couleurs vives, son dynamisme, sa luminosité et par les mouvements des bras des personnages, donne une grande force à l’événement qui s’est produit et nous touche tous de près parce que nous sommes destinés à mourir. Mais, comme le montre le Greco dans son œuvre, la mort ne peut avoir le dernier mot. C’est ce que celui dont le nom a un sens profond : Dominikos vient du latin « dominicus ou consacré au Seigneur » et Theotokópoulos signifie « Fils de la Mère de Dieu » veut nous faire comprendre : elle n’est qu’un passage vers une autre vie, une rencontre où l’Amour transfigure tout. Marie, élevée dans la gloire, nous attire à elle pour nous donner, dès à présent, un avant-goût de cette joie éternelle promise par Dieu. Le Greco laisse entrevoir son mysticisme et son adhésion à la Contre-Réforme où la Vierge joue un rôle essentiel dans la rédemption des humains.

L’Assomption annonce le jugement dernier. C’est ce que nous rappelle l’Eglise en faisant mémoire le 22 Août, de Marie, la femme couronnée d’étoiles dont parle l’Apocalypse. La première oraison qui est proclamée lors de la messe le dit clairement : « Dieu qui a voulu que la Mère de ton Fils soit notre Mère et notre Reine, fais que, soutenus par son intercession, nous obtenions dans le ciel la gloire promise à tes enfants ». Ce jour-là, le peuple chrétien salue et prie Marie. Reine du ciel et Mère de miséricorde, celle qui toute sa vie fut la servante du Seigneur, nous a ouvert le chemin qui conduit à Lui.

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