Premier roman sur Chéops à Paris

05-07-2023 04:20 PM


Par coïncidence et comme en écho à l’exposition Ramsès II qui s’installe jusqu’au 6 septembre à la Villette, à Paris, les éditions Orients ont publié « Chéops, Je suis l’éternité ». Ce livre est co-écrit par Zahi Hawass – ancien ministre et auteur de plusieurs livres à succès qui a fouillé Guizeh pendant plus de vingt ans et mis en lumière le rôle déterminant des bâtisseurs de pyramides – et par Véronique Verneuil, égyptologue et autrice. Ils nous entraînent tous deux au cœur de Chéops, qui n’a pas encore délivré tous ses secrets…

Ce pharaon vécut près de treize siècles avant Ramsès II. Connu pour avoir bâti la grande pyramide de Guizeh, il y a 4500 ans, ce monarque est mal connu du grand public. C’est la raison pour laquelle Zahi Hawass et Véronique Verneuil ont dû s’en remettre à la fiction pour l’évoquer.
Très documenté, ce livre s’attache à décrire le parcours du fils du pharaon Snéfrou : de sa prise du pouvoir à sa mort. S’il renseigne sur la manière dont étaient élevés les jeunes princes dans des « maisons de vie » où leur éducation mêlait apprentissage des lettres, des sciences mais aussi des choses de la religion, cet ouvrage nous en apprend aussi beaucoup sur la manière dont furent édifiés les grands monuments de l’époque.
Ils ont introduit dans ce livre toutes les découvertes récentes effectuées par les archéologues, à commencer par celles de l’Américain Mark Lehner qui a beaucoup travaillé avec Zahi sur le plateau de Guizeh. C’est lui qui a notamment exhumé l’ancien campement où vivaient les ouvriers qui ont travaillé sur les pyramides.
C’était il y a quatre mille six cents ans sur ce plateau où régnait Chéops, le pharaon devenu immortel grâce à la dernière merveille du monde qui existe aujourd’hui. Ce roman historique, inspiré de la réalité, est un récit de l’édification de la plus grande des pyramides de Guizeh raconté à la première personne par Chéops, le pharaon bâtisseur.

« Et moi, cria Chéops, je suis l’éternité », écrivait Victor Hugo dans « La légende des siècles : Les Pyramides » . Cette œuvre fait partie d’un ensemble de poèmes évoquant les sept merveilles du monde. Tour à tour, chaque merveille s’exprime à travers un poème, la dernière étant la pyramide de Chéops. Voilà qui inspire le beau titre de cet ouvrage dont les auteurs qui ont pris le parti de raconter, à la croisée de la fiction et de la réalité, la grande entreprise à la fois politique et urbanistique du pharaon Chéops. Une vie pleinement vécue depuis des siècles devient ainsi un moment actuel. Par la magie de l’écriture toute une ville s’édifie devant les yeux du lecteur avec force détails réels et réalistes basés sur les ruines et artefacts découverts et analysés par les archéologues depuis le début de l’égyptologie.

Il s’agit d’un sentiment qui traverse les siècles car ce n’est pas tant à travers les secrets complexes de la momification et les rituels funéraires que Chéops accède à l’éternité comme nous permet de constater ce roman historique. C’est avant tout grâce à sa prodigieuse entreprise de développement et d’urbanisation, autant que l’édification de la plus colossale des pyramides de Guizeh que ce pharaon visionnaire entre dans l’histoire.

Pouvoir, croyances, mode de vie, gouvernance et ingéniosité se joignent pour construire la plus grande des pyramides. Son chantier nous emmène de Memphis au Sinaï, jusqu’à la mer Rouge. Mais la part inattendue de l’ouvrage est celle réservée à un sentiment qui traverse les siècles. Il s’agit de l’amour que porte Chéops pour une belle paysanne qui va transformer la vie du pharaon, de la cour et du peuple.

« L’amour donne des ailes et des idées ! » fait dire le duo d’auteurs à ce bâtisseur. « Il décupla mon énergie, ma force et mon imagination » confie le héros du roman au début du XIIe chapitre, un chapitre clé où, sous le titre « Ankhou-Khoufou, que vive Chéops ! », il raconte le processus et l’organisation des chantiers de son projet littéralement pharaonique. Il y est notamment question de l’efficacité de la stratégie mise au point par Chéops avec ses conseillers : « Commencer plusieurs chantiers simultanément ».

Profitant de ce que des équipes d’ouvriers précédemment recrutés par Snéfrou le père de Chéops travaillaient encore sur le site inachevé de Dahchour, Chéops les emploie à son profit. « Nous savions d’expérience que le plus important était la logistique » confie le pharaon du roman. Il explique : « Relativement peu d’hommes compétents et qualifiés suffiraient pour débuter notre entreprise à une seule condition : que les matières premières et les vivres soient livrées sans interruption ». On se verra confirmer que les grands souverains sont avant tout d’excellents recruteurs. Chéops trie ses directeurs sur le volet, en fonction de leur excellence, mais aussi de leurs affinités, car il est impensable pour le pharaon de faire collaborer deux architectes qui ne s’entendent pas entre eux.

Par-delà les aventures de Chéops, décrit en courageux guerrier, et l’histoire d’amour que lui prêtent les auteurs avec une jeune paysanne du nom de Hénoutsen, les lecteurs découvriront au fil des pages la manière dont vivait le peuple égyptien : prêtres, scribes et simples artisans. « Ils ont tous contribué à leur manière à édifier cette civilisation que nous admirons tant aujourd’hui. Empruntant, en forme de clins d’œil, quelques éléments à la littérature pharaonique (tel le conte des rameuses ou une scène de chasse à l’hippopotame), ce roman divertissant autant qu’érudit émet l’hypothèse que Chéops s’est fait enterrer dans une chambre secrète pour ne pas voir sa tombe subir les mêmes pillages que celle de sa mère Hétep-Hérès Ire. Zahi Hawass pense pouvoir bientôt loger cette chambre funéraire avec précision.

Depuis six ans, une équipe de scientifiques japonais a, en effet, pu établir une cartographie de grandes cavités à l’intérieur de la pyramide de Guizeh. En mars dernier, une caméra endoscopique a inspecté un couloir de neuf mètres de long et plus de deux mètres de large qui présentait une succession de niches intrigantes.

L’ouvrage est une mine d’informations appuyées sur des preuves archéologiques qui font surgir et revivre pour le lecteur, « tel un péplum pharaonique », racines pluri millénaires produisant un évènement culturel pharaonique, les cités enfouies dont les secrets n’ont pas encore été entièrement livrés mais qui, de génération en génération, ont été essentielles à l’évolution des civilisations.

Ce livre est une œuvre d’art littéraire qui réussit à capturer l’essence de l’éternité et le mystère de manière à la fois poétique et stimulante. Véronique Verneuil et Zahi Hawass, ont voulu faire un roman d’apprentissage puisqu’on ne connaît rien du pharaon Chéops, pratiquement rien. On a une petite statuette de lui, on a sa grande barque funéraire, évidemment sa pyramide, mais on n’a aucun document vraiment du règne. Il fallait être à la fois archéologue, égyptologue pour pouvoir retransmettre l’esprit d’une époque et en même temps être romancier pour entrer dans la tête d’un mec dont personne ne connaît rien.

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