L’icône de l’Assomption par Alain Chenal

23-08-2022 08:14 PM


L’Eglise copte orthodoxe célèbre le 16 Misra, correspondant au 22 août de chaque année, l’assomption du corps de la toute pure, la sainte Vierge Marie. Le synaxaire raconte les détails de cette histoire expliquant que tandis qu’elle priait auprès du saint sépulcre dans l’attente du moment joyeux où elle sera délivrée des liens charnels, l’Esprit Saint lui apprit qu’elle quittera rapidement ce monde périssable. Le moment venu, les apôtres et les vierges du mont des oliviers arrivèrent. Alors que notre dame était étendue sur son lit, notre Seigneur vint, entouré d’un grand nombre d’anges, la consola et lui apprit quel grand bonheur lui était préparé. La vierge en fût heureuse et, ayant tendu le bras, elle bénit les apôtres et les vierges présentes. Puis elle rendît l’âme entre les mains de son fils et son Dieu, Jésus Christ qui l’éleva vers les demeures célestes.

Les apôtres embaumèrent son corps et partirent pour Gethsémani. En chemin, des juifs voulurent s’interposer et empêcher son enterrement. L’un d’entre eux attrapa le cercueil, alors ses mains se séparèrent de son corps et y restèrent attachées. Lorsqu’il crut et regretta son geste, ses mains reprirent leur place sur son corps par les prières des saints apôtres.

Or, Thomas l’apôtre n’était pas présent avec eux au moment du décès de notre dame. Il arriva au moment où elle fut enterrée et eut la vision du corps pur qui s’élevait vers le ciel soutenu par les anges. L’un d’entre eux lui dit : ” Dépêche-toi et embrasse le corps de la toute pure, sainte Marie “. Il fit ce qui lui était demandé.

Ayant rejoint les autres apôtres, ils lui apprirent le décès de notre dame. Il leur répondit : ” Je ne croirai cela que lorsque je verrai son corps. Vous savez que j’ai douté de la résurrection du Christ. ” Alors, ils allèrent avec lui au tombeau et l’ayant ouvert il n’y trouvèrent pas le corps. Ils en étaient tous abasourdis. Alors Thomas leur raconta comment il avait vu le corps pur emporté par les anges vers le ciel. L’Esprit Saint leur expliqua que le Seigneur n’a pas voulu que le corps demeure sur terre.

Le Seigneur leur avait promis qu’ils la reverraient avec son corps. Ils attendirent l’accomplissement de cette promesse jusqu’au 16 Misra où ils la virent assise à la droite de son fils et son Dieu et entourée du chœur des anges. Ainsi s’accomplit la prophétie de David qui dit : ” La reine s’est tenue à la droite du Roi “.

La vierge Marie mourut à l’âge de 60 ans dont elle passa 12 ans au temple, 30 ans dans la maison de Joseph et 14 ans chez saint Jean l’évangéliste selon la recommandation que lui avait faite le Seigneur ” Voici ton fils.” Il avait dit à saint Jean : “Voici ta mère”.
L’occasion de s’approcher de ce mystère par la présentation de l’icône de l’Assomption ou de la Dormition réalisée par Alain Chenal.
Cette icône s’inspire d’un modèle orthodoxe traditionnel du 16e Siècle et de fresques contemporaines de Mgr Jean de Saint Denis, évêque orthodoxe. Marie est présentée couchée sur son lit funéraire, endormie ou dans la léthargie d’une extase. Elle est symboliquement entourée des apôtres, avec Saint Pierre à sa tête et Saint Paul à ses pieds. D’après la tradition orthodoxe, tous les apôtres sauf Saint Thomas, et Saint Paul, auraient été rassemblés miraculeusement par les anges pour assister à la « dormition » de Marie, mais Saint Thomas, arrivé trois jours après, voulant voir le corps de Marie a trouvé son tombeau vide. Pierre encense le lit funéraire tandis que Paul s’incline dans une attitude de profonde vénération (ses mains cachées sous le plis de son manteau). Les autres apôtres se prosternent devant le Mère de Dieu ou sont dans des positions de tristesse et de prière. Des figures de femmes et d’évêques représentent toute l’Église indivise. Des constructions symbolisent les deux Églises institutionnelles d’orient et d’occident, encore séparées mais réunies dans leur vénération commune de Marie.

La composition de l’icône est centrée sur la figure de l’âme de Marie « élevée » par le Christ. Celui-ci est penché miséricordieusement sur Marie. Les archanges et séraphins accompagnent le voyage de Marie et l’accueillent dans le royaume du Christ. Ils apparaissent dans une arche, une porte d’entrée dans le royaume de Dieu.

Marie est couchée sur un lit funéraire rouge signifiant la présence de l’Esprit Saint comme lors de la Nativité de Jésus. Elle est en extase, son esprit est « ravi» en Dieu, ravissement provoqué par l’intensité de son désir d’union d’Amour avec Dieu en son Fils Jésus-Christ. Son esprit est en totale communion avec Dieu. Son âme s’est séparée de son corps comme cela est arrivé à de nombreux saints en extase (Sainte Thérèse d’Avila en particulier).

L’âme est représentée sous la forme d’un germe lumineux, comme un nouveau-né dans le royaume de Dieu ou une petite « momie» en transition vers la vraie Vie. Elle est recueillie par son fils Jésus et portée dans son royaume, accompagnée par les anges porteurs de lumières. Son corps, lui, est élevé au ciel par deux anges pour rejoindre son esprit et retrouver l’unité de sa personne, esprit, âme, dans un nouveau corps transfiguré, dans le Royaume de Dieu. Marie est le prototype de l’humanité destinée à « renaître au ciel », à se diviniser et ressusciter dans une chair glorifiée. Elle est aussi figure de l’Église unie au Christ. Marie, est représentée selon l’iconographie catholique, dans une mandorle comme le Christ lors de la Transfiguration. Marie est la première personne humaine, après le Christ à avoir reçu ce corps glorieux, transfiguré qui sera le nôtre après la « résurrection de la chair, dans la Vie à venir » comme le proclame le Crédo. C’est ce corps qui est perçu par les « voyants » lors de nombreuses apparitions de Marie aux saints.

Elle est « élevée au-dessus des anges » comme chantent les orthodoxes, car les anges, purs esprits, n’ont pas de corps glorifié. Marie est représentée en position « d’orante » car elle prie incessamment pour les hommes.

La dynamique ascendante qui traverse l’icône marquée par l’arche des anges rappelle que Marie peut être considérée comme une nouvelle arche d’alliance qui emmène l’Humanité vers la « création nouvelle », elle est porte du ciel. Marie est la « nouvelle Eve », par sa pureté et par l’intensité de sa confiance en Dieu, son « oui » affirmé lors de l’Annonciation qui a enclenché l’incarnation de Dieu.

C’est pourquoi certaines icônes orthodoxes montrent Marie au ciel dans la position de l’Annonciation. La dormition est alors une image de la divinisation de l’Homme, du retour de l’humanité à Dieu après l’incarnation de Dieu en l’Homme par Jésus-Christ.

Cette icône interpelle chacun, croyant ou incroyant sur notre destinée après la mort, sur la Vie après la vie. Notre personne se réduit-elle à un corps mortel animé momentanément par un psychisme qui disparaît avec la mort ou avons-nous une âme dont la fine pointe, le germe, l’esprit est d’origine divine et peut donc être éternelle et trouver une nouvelle vie en Jésus-Christ qui a vaincu la Mort par sa Résurrection, ce qui est la foi et l’espérance chrétienne?

Que la contemplation de cette icône, figurant la destinée finale de Marie, notre prototype, nous conforte dans la foi en notre propre destinée qui est d’entrer, après notre mort, dans la Vie divine trinitaire, esprit, âme et corps après notre résurrection en Jésus-Christ. Demandons que Marie « prie pour nous maintenant et à l’heure de notre mort. »

Cette icône a été bénie à l’Assomption 2016 par le Père D. Gonneaud en l’église Notre Dame de Dijon et offerte à la paroisse où elle est exposée dans la chapelle de l’Assomption.

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