Les œuvres de Tahtawi les plus vendus à la Foire internationale du livre du Caire

05-02-2015 03:30 PM


Les activités de la quarante-sixième édition de la Foire International du Caire ont débuté le 28 janvier 2015 et se poursuivront jusqu’au 12 février courant. Les œuvres complètes de Tahtawi sont les livres les plus vendus de l’exposition.

Rifa’a Rafée al-Tahtawi surnommé al-ahāwī de par son lieu de naissance (1801Tahta – 1873Le Caire) est un réformateurégyptien.

En 1817, Rifa’a quitte son village natal de Tahta – situé en Haute-Égypte dans le Gouvernorat de Sohag – pour suivre les cours de l’université al-Azhar au Caire. En 1826, il est nommé imâm de la première mission scolaire égyptienne envoyée en France parMéhémet Ali et profite de ce voyage pour étudier la langue française et se spécialiser dans le domaine de la traduction.

Son expérience de la société française, après un séjour de cinq ans à Paris avant 1831, lui a inspiré une réflexion sur l’évolution de la civilisation musulmane et sa rencontre avec la modernité occidentale.

Chargé de l’instruction dans le programme de réformes de Mohamed-Ali, il a publié un ouvrage sur le devenir de la civilisation islamique en 1834 (Takhlîç al-ibrîz fî talkhîç Bârîs, trad. fr. L’Or de Paris, 1988) , qui lance le débat qui sera repris par les réformateurs de la renaissance intellectuelle musulmane, la Nahda. Il s’agit d’un récit de voyage (rihla) dans lequel il décrit la vie en France – mœurs, institutions et lois, organisation – le regard est celui d’un personnage fasciné par la civilisation européenne, et dont le souci premier est d’en tirer pour l’Égypte les éléments d’une modernisation compatible avec l’islam. Le style est limpide, et révèle une claire tendance à l’assouplissement de la syntaxe. Tahtawi veut simplifier la langue, pour transmettre un nouveau message au plus grand nombre.

Afin que s’accomplisse la renaissance de l’identité musulmane, il proposait le développement de l’instruction et l’instauration de la démocratie. Il inspirera les réformateurs de la fin du siècle.

Tahtawi « joue le rôle d’une institution culturelle complète à lui seul ». Il va ainsi prendre la direction du premier journal égyptien, “al-Waqâ’i‘ al-Miçriyya” rédigé en arabe et en turc, fondé par Méhémet Ali en 1828 ; fonder l’école de langues, en 1835 ; être rédacteur en chef du Journal Officiel en 1840  et enfin diriger le Bureau de traduction, ouvert à son instigation en 1841.

Mais le khédive Abbas Ier, opposé aux modernisateurs, éloigne Rifa’a al-Tahtawi au Soudan de 1848 à 1854. Le khédive Saïd le fait revenir et le nomme miralaï (général de brigade). Rifa’a transforme l’École militaire de la Citadelle qu’il dirige dès lors en université militaire. Une nouvelle fois écarté de ses responsabilités à l’École militaire en 1861, il devient directeur du département des traductions de 1863 à sa mort en 1873.

La plupart des ouvrages traduits sont signés par des auteurs français, et couvrent des champs aussi variés que la géographie, la philosophie ou l’histoire. Tahtawi prend alors très à cœur sa traduction des “Considérations sur les causes et la grandeur des Romains et de leur décadence”
Dans cet ouvrage, Montesquieu a bien entendu fait une analyse de la situation historique très précise qui a été celle de l’Empire romain, mais il est permis d’y lire en filigrane la conceptualisation de tout empire caractérisé par des phases d’apogée et de chute. C’est ce qui intéresse particulièrement Tahtawi, dans la mesure où il cherche à mieux comprendre les bouleversements politiques et sociaux que connaît l’Empire ottoman. Par ailleurs, dans les années 1850, il œuvre beaucoup pour la publication des grands classiques arabes (et notamment les ouvrages d’Ibn Khaldoun), ce qui témoigne de son attachement profond à la tradition intellectuelle arabe. Il est ainsi toujours en quête d’un élargissement de ses horizons dans le but de mieux aider à la réforme de son propre pays, et en puisant toujours dans la tradition arabe.

Tahtawi incarne la rencontre intellectuelle entre la modernité politique telle qu’elle a été pensée en Occident, et la tradition islamique qui continue de jouer pleinement son rôle dans l’Egypte du XIXe siècle. Avant lui, aucun intellectuel arabe n’avait formalisé de façon si systématique cette convergence. Après lui, les écrits sur la question seront nombreux, et viendront nourrir ce mouvement appelé laNahda.

 

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