L’Egypte reprend la route de la stabilité

06-02-2014 03:54 PM

Karim Felli


La crise politique a fait fuir investisseurs et touristes. Dans ce contexte, le chef de l##armée Abdel Fattah al-Sissi, homme fort du pays, a annoncé jeudi dernier à un journal koweïtien qu##il pourrait être candidat à la présidentielle prévue dans les trois mois. Dans une interview au journal koweïtien Al-Siyassah,

 
 il avait expliqué que “la question a été tranchée” au sujet de sa candidature à la présidentielle en Egypte, qui doit avoir lieu dans les trois mois. 
 
Dans un communiqué jeudi, l’armée égyptienne ne dément pas qu’il le fera, mais assure que le maréchal ne l’a pas dit de manière “directe” à Al-Siyassah.
L’annonce du président du Conseil suprême des Forces Armées a été mal “interprétée”, selon le communiqué. 
Al-Sissi avait affirmé que “l’appel du peuple a été entendu partout et je ne le rejetterai pas. Je demanderai un renouvellement de la confiance du peuple à travers un scrutin libre”, ajoute-t-il.
Il a déclaré qu’il demanderait l’aide du peuple pour “guérir l’Egypte de sa maladie chronique, qui s’est aggravée au cours des dernières années”, dans une allusion aux Frères musulmans. Mais il a insisté sur le fait qu’il ne donnerait pas de faux espoirs au peuple égyptien quant à une résolution rapide des problèmes. “Nous ne nous jouerons pas de leurs espoirs et nous ne leur dirons pas que nous avons une baguette magique”.
Le maréchal Sissi a par ailleurs déclaré que, s’il était élu, il appellerait à une alliance entre les pays arabes “pour mener une guerre commune contre le terrorisme”.
“Je crois que les Etats du Conseil de coopération du Golfe et d’autres pays accueilleront favorablement une telle union pour éradiquer la terreur”, a-t-il dit.
Le maréchal Sissi est soutenu par les riches monarchies pétrolières du Golfe, notamment l’Arabie saoudite et les Emirats arabes unis.
 
Nouvel espoir pour l’économie
 
Simultanément, le premier ministre et le ministre de l’Industrie ont effectué des tournées dans certaines capitales arabes ainsi qu’occidentales afin d’attirer plus d’investissements. A noter que l’Égypte et l’Arabie saoudite sont deux facteurs d’équilibre dans le monde arabe, a déclaré le premier ministre Hazem Al-Beblaoui, en visite à Riyad lors d’une conférence de presse tenue mercredi en sa résidence. “Si les deux pays s’accordent, toute chose peut réussir, sinon, toute chose peut échouer”, a-t-il dit, ajoutant que son déplacement parachevait les entretiens et les contacts permanents entre les responsables et les peuples des deux pays. Al-Beblaoui a indiqué avoir adressé une invitation, lors d’une entrevue avec le prince héritier et le premier vice-premier ministre saoudien l’émir Salmane ben Abdel Aziz, au roi Abdallah Ben Abdel Aziz pour effectuer une visite au Caire. Le premier ministre a affirmé avoir transmis à l’émir Salmane un message de remerciements du président Adly Mansour où il exprime la gratitude de l’Égypte envers l’Arabie saoudite pour son soutien.
 
Le Golfe soutient avec force l’Égypte
 
Le prince héritier de l’Arabie saoudite et premier vice-premier ministre, l’émir Salmane ben Abdel Aziz a affirmé que son pays continuerait à soutenir avec force l’Égypte. Ce qui nuit à l’Égypte nuit à l’Arabie saoudite, et ce qui la réjouit, réjouit l’Arabie, a indiqué l’émir Salmane, au terme de son entretien avec le premier ministre, Hazem Al-Beblaoui. La sécurité et la stabilité de l’Égypte sont importantes pour les pays arabes, a souligné l’émir Salmane. Al-Beblaoui a pour sa part précisé avoir transmis au roi Abdallah Ben Abdel Aziz d’Arabie saoudite un message de remerciements au président par intérim, Adly Mansour pour son soutien à l’Égypte pendant la dernière période, affirmant que les deux pays étaient deux piliers dans la région arabe.
Le premier ministre, Hazem El-Beblaoui a annoncé, lors de sa visite en Arabie Saoudite, les projets à financer par le deuxième versement d’aides saoudiennes estimés à 30 milliards de LE. Dans des déclarations faites au journal saoudien Okaz, le ministre du Plan et de la Coopération internationale, Achraf al-Arabi a souligné qu’il s’agit des projets de service contribuant à la réalisation de la justice sociale. Il a démenti que ce deuxième groupe d’aides soit destiné au financement de l’axe du canal de Suez ajoutant que 10 milliards de LE seront réservés au minimum salarial alors que les 20 milliards seront destinés à d’autres projets tout en refusant de donner davantage de détails en ce sens.
Dans des déclarations faites au même journal, la ministre de l’Information, Doreya Charaf Eddine a qualifié d'”importante”cette visite qui selon elle, intervient dans une conjoncture critique et contribuera à la consolidation du partenariat entre Riyad et Le Caire.
 
Rassurer les investisseurs
 
Charaf Eddine a affirmé en outre que le gouvernement ne comptait pas se réconcilier avec les Frères Musulmans ou tous ceux qui ont les mains entachées du sang des innocents. A propos de la présidentielle, la ministre a signalé que la candidature à ce poste est disponible à tous.
Le premier ministre devait rassurer les investisseurs saoudiens et leur confirmer que le gouvernement égyptien est sérieux quant à l’élimination des obstacles qu’ils peuvent affronter. Il a affirmé l’importance de l’échange de visites aux niveaux médiatique et commercial. De sa part, le Premier Ministre a confirmé que la sécurité du Golfe faisait partie de celle de l’Égypte, invitant le prince héritier à visiter prochainement l’Égypte.
Reste que les pays du Golfe, Emirats arabes unis, Arabie saoudite, Koweït, se sont engagés à financer l’Egypte de l’après-Morsi. On parle d’un engagement financier de plus de 12 milliards de dollars. Une aide qui devrait permettre au gouvernement d’annoncer, dans quelques jours, une deuxième tranche du plan de stimulation économique, et cela sans aggraver le déficit budgétaire.
 
Tournée internationale
Le ministre de l’Industrie, Mounir Fakhry Abdel Nour, a de sa part entamé, par Paris, une tournée internationale qui le mènera en deux mois à Berlin, Bruxelles, Londres, Washington et Moscou. Le gouvernement égyptien s’appuie sur l’adoption d’une nouvelle Constitution, par référendum, il y a deux semaines, pour rassurer les Occidentaux quant à son ancrage démocratique.
Une élection présidentielle est prévue pour fin mars, suivie de législatives à la fin de l’été. Le risque d’une dictature en Égypte? Avec “un peuple qui a fait deux révolutions, contre la dictature de Moubarak et contre le fascisme religieux de Morsi, impossible!”, balaie le ministre Abdel Nour, un copte parfaitement francophone, éduqué chez les jésuites. En outre, ajoute-t-il, “l’Égypte n’a plus les moyens financiers d’un régime paternaliste”.
De fait, depuis l’éviction de Moubarak en 2011, le nombre de touristes a chuté de 40%, les recettes touristiques de 50%. Quant aux investissements étrangers, ils se sont effondrés: de 12 milliards de dollars en 2008 à “moins de 2 milliards en 2013”, selon Abdel Nour.
 
Message aux dirigeants d’entreprise
 
Mounir Fakhry Abdel Nour qui était lundi et mardi dernier à Paris, a voulu porter avant tout un message politique aux dirigeants et aux chefs d’entreprise français. Il s’agit de “changer la perception qui, malheureusement, prévaut. Car ce qui s’est passé en Egypte de juin à juillet 2013 n’est pas un coup d’Etat militaire, mais un coup de pouce de l’armée à une révolution populaire qui s’est opposée aux Frères musulmans”, dit-il dans un entretien aux “Echos”, un quotidien économique et financier.
Pour le ministre du Commerce et de l’Industrie, la Confrérie et Mohamed Morsi, destitué un an après son arrivée à la présidence, étaient en train de construire un Etat “ni démocratique, ni civique, ni juste, ni moderne”, contrairement aux buts de la révolution du 25 Janvier 2011 qui avait renversé Moubarak : “On faisait fausse route.”
Mounir Fakhry Abdel Nour plaidait devant le Medef “la fédération des patrons et des hommes affaires français” avant de rencontrer les ministres du Redressement productif, Arnaud Montebourg, puis du Commerce extérieur Nicole Bricq, la Constitution adoptée à la mi-janvier par voie référendaire à 98 % des électeurs “garantit un Etat de droit. Elle présente des avancées énormes sur les droits de l’homme et de la femme, les droits des minorités, la séparation et l’équilibre des pouvoirs par rapport aux Constitutions précédentes.” Le ministre a-t-il convaincu ? Le chef de la diplomatie française, Laurent Fabius, qu’il a rencontré, l’a assuré “du soutien de la France au peuple égyptien”. Le retour de la stabilité politique est pour Abdel Nour la clef d’une reprise de l’économie notamment pour le secteur du tourisme, mais aussi pour attirer des investisseurs. Pour l’exercice fiscal commencé le 1er juillet et s’achevant le 30 juin 2014, Le Caire table sur 4 milliards de dollars d’investissements directs étrangers, une augmentation d’un tiers par rapport à l’année précédente, mais loin des quelque 8 milliards d’avant la révolution de 2011.
 
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