Une plongée onirique dans l’horreur de l’après-guerre

02-11-2017 11:44 AM


Il est très rare qu’un grand livre donne un grand film. Alors, ne boudons pas notre plaisir quand cette alchimie réussit. C’est le cas avec Au revoir là-haut, roman de Pierre Lemaitre (Goncourt 2013) porté au cinéma par Albert Dupontel…
En 600 pages, Pierre Lemaitre a raconté une histoire aussi captivante qu’invraisemblable, celle de deux jeunes poilus unis par le malheur : Édouard le bourgeois et Albert le prolétaire.
Écrasés par une bombe, ils se sont mutuellement sauvés la vie mais le premier en est sorti « gueule cassée ». Après l’Armistice, ils vont vivoter en marge de la France des Années folles.
Édouard refuse absolument de revoir son père. Artiste, il dissimule son visage derrière des masques et concocte une énorme escroquerie aux monuments aux morts.
Dans le même temps, leur ancien lieutenant, odieux personnage, s’enrichit en décrochant des marchés publics pour l’exhumation des tombes de soldats.
Autour de ce canevas romanesque à souhait, Albert Dupontel a brodé une adaptation cinématographique à son image, décalée, pleine d’humanité et de tendresse, mais qui ne laisse place à aucune illusion sur la brutalité des rapports sociaux.
Le réalisateur a le mérite d’avoir fait un excellent choix d’acteurs : lui-même dans le rôle du poilu Albert, Niels Arestrup dans celui du père mal-aimant, la prometteuse Héloïse Balster dans celui de la petite Louise…
Il a eu aussi l’intelligence d’alléger la trame du livre et de s’en écarter juste ce qu’il faut pour lui être encore plus fidèle !
Nous retrouvons dans le film la fluidité et le rythme enlevé du roman ; nous y retrouvons aussi l’histoire et les personnages dans ce qu’ils ont d’essentiel. Pourtant, ainsi que le reconnaît Pierre Lemaitre lui-même, plus de la moitié des scènes ont été réinventées par le réalisateur et scénariste Albert Dupontel !
Sur un rythme bien enlevé, Au revoir là-haut restitue ce que l’on sait de la démobilisation, des hôpitaux et du sort des blessés, de la misère confrontée à l’opulence…
Le film évite toutefois les images glauques de « gueules cassées » et ne risque pas d’inspirer des cauchemars aux enfants et aux âmes sensibles qui viendront à le voir. On en sort ému et léger, comme d’un rêve étrange..

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