L’Egypte sur la carte mondiale du cinéma

19-05-2016 12:11 PM


Quelque 130000 personnes ont participé jusqu’à ce dimanche au 69e Festival de Cannes. La ville de Cannes a vu sa population passer de 74000 à 200000 âmes lors de son Festival international du film. Journalistes, professionnels du cinéma, cinéphiles ou simples curieux…
Nul doute qu’il y a un grand retour du film égyptien sur la carte du cinéma mondial. Ceci fut démontré lors du 69e Festival de Cannes.
Au cours des cinq dernières années, de nombreux films ont dépeint les différents dilemmes auxquels sont confrontés la société égyptienne car elle est passée à travers de vastes changements politiques, en particulier après la révolution du 25 janvier. Cependant, peu de films ont abordé les  manifestations du 30 juin, qui ont conduit à l’éviction de Mohamed Morsi issu des Frères musulmans.
Témoigner les émeutes qui ont suivi l’éviction de Morsi aux yeux d’un groupe pro-Frères, des partisans de la révolution du 30 juin, et d’un journaliste qui voulait juste une couverture en direct des manifestations, tous enfermés ensemble dans un fourgon de police, est le choc des perspectives qui compose le dernier film de l’écrivain Mohammed Diab, “Echtebak” (clash) qui a fait l’objet d’une grande ovation du public cannois.
Echtebak a ouvert ‘Un Certain Regard’, une section de la sélection officielle du festival, au prestigieux Festival de Cannes cette année. Après la projection, le film a suscité une gamme impressionnante de réactions des points de vente internationaux, des journaux et des magazines comme le “tant attendu suivi [Caire 678]” – un autre film dans lequel Diab aborde le harcèlement sexuel, l’une des questions les plus problématiques auxquelles fait face la société égyptienne.
Vivre (ou mourir) ensemble
Eté 2013. Deux ans après la révolution qui a secoué les fondations les plus solides de l’Egypte, la rue gronde toujours et les manifestants de tous bords battent le pavé. La destitution de Morsi précipite en effet la nation dans une confrontation carnassière et violente. Pour prendre le pouls de ce moment de tangage général, Mohamed Diab a choisi l’option du huis clos, qu’il articule ici dans un fourgon de police où le spectateur sera geôlier malgré lui pendant toute la durée du récit.
Dedans : deux journalistes, des sympathisants des frères musulmans, des modérés, un chrétien… Soit un panel sociétal explosif qui cristallise rancœurs, griefs et divergences en cascade. Sans surprise, la tension s’installe vite au sein des frontières métalliques du véhicule à l’intérieur duquel les individus, faute de places disponibles dans les pénitenciers alentour, suffoquent d’un même souffle. Si les instants d’accalmie pâtissent d’une écriture un peu affectée, voire naïve dans son honnête volonté de réanimer les espoirs déchus, Clash fonctionne merveilleusement dans l’action.
Sawah
En marge du festival la publicité a été faite pour un film sur le troisième plus grand groupe de nomades en Europe… le peuple Yéniche qui n’est pas particulièrement connu du grand public. Le Directeur Adolf El Assal, qui est né en Egypte et vit au Luxembourg maintenant, pourrait changer cela avec son prochain film, “Sawah”.
Il raconte l’histoire semi-autobiographique d’un DJ égyptien pacifiste végétarien qui quitte Alexandrie dès le début de la révolution égyptienne pour trouver gloire et fortune en Europe. Il perd son passeport et se retrouve coincé au Luxembourg, où les Yéniches sont parmi les nombreuses personnes qu’il bouleverse.
El Assal est né à Alexandrie lui-même, et a passé sa vie d’enfance à Dubaï et Ras Al Khaimah devant ses parents “par erreur” installés au Luxembourg lors d’un voyage à travers l’Europe.
“Ils pensaient qu’il était à Bruxelles,” dit El Assal. “Ils n’avaient jamais entendu parler du Luxembourg, mais ma mère aimait tellement que nous sommes juste restés là où c’est un endroit super agréable, donc mes parents, médecin et pharmacien, ont tout donné et commencé une nouvelle vie là-bas,” a-t-il indiqué.
Avec un tel parcours atypique, il est surprenant de constater que le dernier film d’El Assal, qui est sur le point d’entrer en production et dont la publicité a été faite au Festival de Cannes, est un peu hors de l’ordinaire aussi.
Le film est au sujet d’un DJ égyptien qui a eu la possibilité de jouer à Berlin,” dit-il. “C’est la capitale de techno du monde, et bien sûr il veut y aller, mais alors que son arrêt de bus était au Luxembourg, il est allé à la salle de bain, manque le bus et perd tous ses biens; donc il est complètement bloqué.
“Il se fait attraper par la police des frontières qui supposent qu’il est un réfugié, et il commence à partir de là.”
El Assal révèle que, lui aussi, DJ dans certains des plus grands clubs du Luxembourg avant qu’il ne soit assez vieux pour cela, s’est écroulé quand il se lassa de la scène.
Il est clair qu’El Assal, comme les Yéniches, a une expérience de déplacement.
«Personne ne sait où adapter ces nomades, et je trouve cela tellement intéressant avec mon propre arrière-plan. L’un des principaux problèmes dans le film est l’identité. Le personnage principal est égyptien, mais il ne sait pas comment s’intégrer dans son propre pays. Personne n’aime sa musique, il joue dans les mariages bizarres et il a ce rêve d’atteindre les étoiles et se coince au Luxembourg,» a-t-il détaillé.
Le film mettra en vedette l’acteur égyptien Ahmed Al Fichawy et la légende musicale Mohamed Mounir (qu’El Assal décrit comme «Michael Jackson l’arabe “), ainsi que Désirée Nosbusch, membre de film de la royauté de Luxembourg et un ancien présentateur de l’Eurovision, avec bien d’acteurs connus de la Chine, de la France et du Portugal.
“Je suis en train de profiter de cette occasion en tant que réalisateur pour mettre le Luxembourg et l’Egypte à la fois sur la carte et briser les stéréotypes. Il y a des stéréotypes dans ce film, mais je vous promets que je vais les briser dans ce que je souhaite être une façon très intelligente,” a-t-il conclu.
Palme d’Or
Après Agnès Varda, Clint Eastwood, Manoel de Oliveira, Woody Allen et Bernardo Bertolucci dans les années récentes, c’est au comédien français Jean-Pierre Léaud que le Festival de Cannes a décidé de rendre hommage. La Palme d’or d’honneur de la 69e édition lui a été remise lors de la Cérémonie de Clôture, ce dimanche 22 mai. Jean-Pierre Léaud fait partie de la légende cannoise. Découvert par François Truffaut qui en fait le jeune héros de son premier film, “Les 400 Coups”, ce gamin extraverti et turbulent de 14 ans débarque sur la Croisette en 1959. Sa spontanéité incarne à elle seule le vent de liberté que fait souffler la Nouvelle Vague sur le 7e art. François Truffaut continue de l’accompagner avec “Antoine et Colette” (1962), “Baisers volés” (1968), “Domicile conjugal” (1970) ou “L’Amour en fuite” (1979). Dès 1965, il entame avec Jean-Luc Godard une longue collaboration dont “Masculin féminin” (1966) et “La Chinoise” (1967) font figure de points d’orgue engagés et avant-gardistes.

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