Le plus ancien monastère chrétien d’Irak détruit par Daech

28-01-2016 01:06 PM


Le monastère Saint-Elie (Dair Mar Elia) de Mossoul, le plus ancien monastère chrétien d’Irak vieux de 1400 ans, a été détruit par les djihadistes de l’Etat islamique (Daech).
 
Les images satellites diffusées mercredi dernier par l’agence Associated Press confirment la destruction du plus vieux monastère chrétien d’Irak situé dans la ville irakienne de Mossoul. Réduit en poussière par l’État islamique, le monastère Saint-Elie âgé de 1400 ans aurait été détruit, selon toute probabilité entre le 27 août et le 28 septembre 2014. C’est un nouveau site historique appartenant au patrimoine mondial qui disparaît.
Dès le mois de juin 2014, au moment où Mossoul est tombé aux mains des jihadistes de l’État islamique, les autorités religieuses mais aussi les défenseurs du patrimoine du Moyen-Orient avaient émis des craintes concernant le devenir de ce bâtiment historique.
Construit entre 582 et 590 AC, le monastère Saint-Elie appelé aussi Dair Mar Elia porte le nom du moine chrétien assyrien – Saint-Élie. S’étendant sur près de 2500 mètres carrés, il ressemblait à une forteresse construite sur une colline, au-dessus de Mossoul. Site sacré pour les chrétiens irakiens pendant des siècles, des lettres grecques « chi » et « rho » qui représentent les deux premières lettres du nom de Christ étaient gravées à l’entrée de ce monument.
Composé de 26 pièces distinctes, d’un sanctuaire et d’une chapelle, ni l’épreuve du temps par l’érosion ou par les nombreuses guerres traversées par le pays n’avait pu le détruire même si une grande partie du toit avait disparu. Pendant la guerre d’Irak, d’ailleurs des militaires américains s’en étaient servis comme lieu de culte.
Les pires pressentiments de destruction au moment de la prise de Mossoul par Daech en 2014 se sont malheureusement mus en réalité. C’est à la suite de la demande de l’agence Associated Press que le cabinet d’imagerie spatiale DigitalGlobe a pris des photos satellites du site. Grâce à la comparaison de ces images avec celles qui avaient été prises antérieurement, la société responsable a pu dater le moment de la destruction. Selon Stephen Wood, le PDG de l’analyse AllSource qui est spécialisé en imagerie satellitaire, avant le 27 août, on apercevrait le monastère et ses 26 chambres, sa chapelle et son sanctuaire, ce qui n’est plus le cas un mois plus tard puisque les « murs de pierre ont été littéralement pulvérisés ». « Des bulldozers, du matériel lourd, des marteaux de forgeron, et peut-être des explosifs ont réduit ces murs de pierre en un champ de poussière grise-blanche. Ils l’ont complètement détruit. » explique encore ce spécialiste.
Le monastère Saint-Elie de Mossoul vient rejoindre la liste déjà longue de plus de 100 sites religieux et historiques démolis en Syrie et en Irak, comme la destruction du Temple de Bel de Palmyre, un très bel édifice de cette cité antique. Face à la destruction du plus ancien monastère chrétien d’Irak, le révérend Paul Thabit Habib, en exil à Erbil, une ville située dans le nord de l’Irak a déclaré à l’agence Associated Press : «Je ne peux pas décrire ma tristesse. Notre histoire chrétienne à Mossoul est victime d’une barbarie jamais égalée. Nous voyons cela comme une tentative de nous expulser [les chrétiens] d’Irak et l’éliminer notre existence sur cette terre.»
Les chiffres viennent faire écho à l’affirmation de cet homme religieux : selon les autorités religieuses, la population chrétienne est passée de 1,3 million à 300 000 fidèles. Des milliers de civils ont été massacrés par l’État islamique et d’autres ont dû fuir une région où pourtant ils étaient installés depuis 2000 ans.
La directrice générale de l’Unesco, Irina Bokova, a de sa part exprimé jeudi sa préoccupation après la destruction du monastère Saint Elie à Mossoul en Irak. “J’exprime mes plus vives préoccupations après la destruction du monastère Saint Elie. Il était le plus ancien monastère d’Irak, et le témoin précieux de la riche diversité culturelle et religieuse de ce pays.
Pendant 1.400 ans ce monastère a servi de lieu de culte et de méditation, dont l’existence était acceptée par des gens de toutes les confessions. Sa destruction est une nouvelle attaque violente contre le peuple irakien, qui confirme les crimes contre l’humanité et l’ampleur du nettoyage culturel en cours en Irak”, a déclaré Mme Bokova.  
“L’Unesco demeure résolue à protéger le patrimoine de l’Irak et à mener la lutte contre le trafic illicite des biens culturels, qui contribue directement au financement du terrorisme”, a enfin souligné la directrice générale de l’Unesco. L’édifice avait survécu à des siècles de catastrophes naturelles et de spoliations. Des générations de moines avaient prié dans sa chapelle à la lumière de la bougie. Sur la porte d’entrée, avaient été creusées les lettres grecques «chi» et «rho», représentant les deux premières lettres du nom du Christ dans l’alphabet grec. Toujours nommée «la grande ville» dans la Bible, Mossoul n’est pas le seul lieu à avoir subi des exactions de cet ordre. Le «régiment de pirates qui n’a rien d’un état» comme l’appelle Joann Sfar, s’est livré à des actes de destruction dans de nombreux sites antiques en Syrie et en Irak, notamment dans le prestigieux sanctuaire de Palmyre, tombé aux mains des djihadistes en mai dernier. L’État islamique a déjà tué des milliers de civils et contraint des centaines de milliers de chrétiens à fuir la région où ils étaient installés depuis près de 2.000 ans.

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