Morsi et les FM déconnectés de la réalité

08-11-2013 12:32 PM

Felli- Michael Victor


La faible mobilisation des partisans du président destitué Mohamed Morsi à l##ouverture de son procès traduit l##affaiblissement croissant d##un mouvement affronté d##une main de fer par les

autorités en Egypte. Et l’obstination de Morsi à se présenter comme le “président de la République” quatre mois après sa destitution à la suite de manifestations monstres réclamant son départ pourrait encore affaiblir son camp, estiment les experts.
Alors que la première audience du procès de Morsi, qui encourt la peine de mort, devait être le temps fort du combat de ses partisans, elle a montré que les islamistes “ne sont pas en position de perturber la mise en place de la feuille de route du gouvernement”, prévoyant une transition via une nouvelle Constitution et des élections générales d’ici mi-2014, affirme Hassan Nafaa, professeur de sciences politiques à l’Université du Caire.
“Si les Frères musulmans (FM), la confrérie de Morsi,  pensaient qu’ils pourraient encore continuer à faire pression longtemps, cette idée a été balayée lundi”, renchérit Hicham Kassem, analyste politique indépendant. Outre le fait qu’ils sont privés de la quasi-totalité de leur direction, emprisonnée, “les Frères musulmans ont perdu le soutien de la majorité de la population”, note Nafaa.
 
Inaudible stratégie
 
Face à l’hostilité de la population et durant les quatre mois de détention au secret du président destitué, ses partisans n’ont cessé de répéter qu’il pouvait encore revenir à son poste et mardi, l’ensemble de la presse égyptienne soulignait que durant son procès pour “incitation au meurtre” de manifestants, Morsi avait répété “11 fois “je suis le président” et mentionné à “21 reprises, sa “légitimité”. “La position des Frères musulmans est déconnectée de la réalité, mais l’attitude de défi, qu’ils ont adoptée lors du procès doit être notée et pourrait galvaniser leurs partisans”, affirme Shadi Hamid, chercheur au Brooking Doha Center.
Mais pour Karim Bitar, directeur de recherche à l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS), “la stratégie de Morsi n’est guère tenable dans la durée car, si elle a le mérite de la constance, elle n’est guère audible au-delà des milieux des Frères”. Et c’est pour cette raison que les islamistes ont été “incapables, contrairement à leurs affirmations, de mobiliser des Egyptiens issus d’autres mouvances que la leur”.
Entrée fracassante
Il a fait une entrée fracassante dans le box grillagé des accusés: sous les applaudissements de ses codétenus et quatre doigts pointés en l’air –le signe de ralliement de ses partisans– le président égyptien islamiste déchu Mohamed Morsi n’a cessé lundi de défier ses juges.
En entrant dans le réduit, celui-là même où son prédécesseur, Hosni Moubarak, comparaît régulièrement pour répondre, lui aussi, de la mort de manifestants contestant son pouvoir, il tient tout de suite à rappeler son rang.
“Mon nom est Mohamed Morsi et je suis le président de la République”, lance-t-il à la cantonade lors de sa première apparition publique depuis sa destitution le 3 juillet par l’armée, qui le détenait depuis dans un lieu secret.
Barbe grisonnante taillée de près, vêtu d’un costume bleu et non des traditionnels habits blancs des détenus, Morsi salue de la main ses partisans et ses avocats dans la salle de cours de l’académie de police, devenue salle d’audience dans un pays qui a ouvert, en deux ans, deux procès de présidents déposés.
“Ce qui se passe actuellement sert à couvrir un coup d’Etat militaire. Je ne peux pas accepter que l’autorité judiciaire couvre un coup d’Etat militaire”, clame-t-il.
Et lorsque le juge Ahmed Sabry Youssef lui demande de se taire pour poursuivre la procédure, il s’emporte: “Je suis ici contre ma volonté et par la force”. Et le juge Youssef de prononcer une suspension d’audience.
A la reprise, à la question de savoir s’il veut s’adjoindre les services d’un avocat, Morsi répond en vociférant: “Je veux un micro”. Puis, s’adressant à la Cour en faisant des moulinets avec les bras, il éructe: “ceci n’est pas un tribunal compétent pour juger un président, il y a eu un coup d’Etat militaire et les leaders de ce putsch devraient être jugés!”.
“Le coup d’Etat est une trahison, un crime”, assène le président destitué, quand que le juge Youssef prononce une nouvelle suspension.
“Exécution ! Exécution! “
Connu pour ses discours fleuve et son entêtement, Morsi n’a pas failli à sa réputation durant l’audience.
Après avoir fait part à ses juges de ses griefs, c’est au tour des policiers qui encadrent son box d’être sermonnés: “Ne laissez personne vous manipuler pour ne pas devenir les ennemis du peuple”, leur lance le président déposé par l’armée après que des millions d’Egyptiens eurent manifesté fin juin pour réclamer son départ.
Dans les travées du tribunal, des journalistes et des avocats des parties civiles hurlent à son adresse: “Exécution! Exécution!”. Il encourt la peine de mort.
Quatre mois après sa destitution, Morsi doit répondre, avec 14 co-accusés, de la mort d’au moins 7 manifestants devant le palais présidentiel le 5 décembre 2012.
Toutes ces scènes, la télévision officielle ne les a pas retenues dans le court montage qu’elle diffuse en boucle depuis la fin de la première audience de ce procès qui reprendra le 8 janvier. Seule a filtré –sans son– une dizaine de secondes d’images du président déchu descendant d’un véhicule et entrant dans le box où sont déjà présents ses co-accusés.
Ces derniers, des membres de sa garde rapprochée et des dirigeants de sa confrérie des Frères musulmans, tournent ostensiblement le dos aux juges, bras levés, quatre doigts en l’air, en référence à la place Rabaa al-Adawiya (quatre se dit “rabaa” en arabe).
A l’appel de leurs noms, les co-accusés scandent “A bas le régime militaire”, en applaudissant celui qu’ils considèrent toujours comme le seul “président légitime”.
Suite à l’audience, Morsi a été transféré à la prison de Borg Al-Arab pour y passer sa période de détention provisoire en attendant le résultat des enquêtes et des plaidoieries.
La prison de Borg Al-Arab
La prison de Borg Al-Arab est le deuxième centre de détention, le plus célèbre en Egypte, après la révolution du 25 janvier.  La première était celle de Tora où l’ancien président Hosni Moubarak avait été placé en détention préventive.
La prison de Borg Al-Arab, construite en 2004, se trouve à l’ouest d’Alexandrie, dans une zone désertique lointaine (Alexandrie/Matrouh). Cette prison, entourée des murs de sept mètres de hauteur, est considérée comme l’une des prisons les plus résilientes aux nombreuses tentatives de prise d’assaut comme ce fut le cas à la prison de Wadi Al-Natron après la révolution du 25 janvier.
La prison de Borg Al-Arab avait accueilli des détenus politiques issus des Frères musulmans et des criminels dangereux.
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