Un président bien fragile en Iran

15-12-2011 10:12 AM

Abdel Massih Felli


  À une semaine de sa prestation de serment, le 5 août devant le Parlement, l’autorité du président iranien réélu, Mahmoud Ahmadinejad, semble de plus en plus contestée, y compris au sein de son propre camp conservateur. Mahmoud Ahmadinejad semble fragilisé par les tensions au sein de son propre camp, avant sa prestation de serment devant le Parlement et le vote de confiance sur son gouvernement qui doit suivre, d’ici au 28 août. Les querelles sur la formation du gouvernement semblent refléter la division grandissante entre le président et le Guide suprême Ali Khamenei, deux hommes jusque-là alliés contre le camp réformateur de Mir Hossein Moussavi et Mehdi Karoubi. L’ex-président iranien Akbar Hachemi Rafsandjani, qui avait soutenu Mir Hossein Moussavi pendant la campagne, a démenti dimanche 26 juillet toute « lutte pour le pouvoir» avec l’ayatollah Ali Khamenei. Hachemi Rafsandjani, un conservateur pragmatique, dirige deux institutions clés du régime, l’Assemblée des experts et le Conseil de discernement. Reste à savoir quel sera l’impact de ces divisions sur le dossier nucléaire, alors que les États-Unis attendent, d’ici à l’automne 2009, une réponse à leur offre de dialogue avec l’Iran. S’exprimant pour la première fois sur les arrestations des protestataires contre sa victoire électorale le 12 juin, Ahmadinejad a demandé dans une lettre au chef du pouvoir judiciaire Mahmoud Hachémi Chahroudi de libérer d’ici le 7 août les manifestants qui ne font pas l’objet de graves accusations. Parallèlement, le Parlement dominé par les conservateurs a déposé en urgence une proposition de loi sur la transformation de quatre vice-présidences en ministères, de crainte d’une concentration du pouvoir aux mains de Ahmadinejad, lui-même un ultraconservateur. Les ministres doivent obtenir la confiance des députés, contrairement aux vice-présidents. Le texte est consécutif au tollé provoqué dans le camp conservateur par la nomination par Ahmadinejad d’Esfandiar Rahim Mashaie premier vice-président. Le président a été contraint de le démettre sur ordre de Khamenei. Arrêtées et manifestatants L’Iran a libéré depuis quelques jours 140 personnes arrêtées en lien avec les manifestations qui ont suivi l’élection présidentielle. Le guide suprême, Ali Khamenei, a également ordonné la fermeture d’une prison où, selon des défenseurs des droits de l’Homme, des manifestants emprisonnés auraient été tués. L’opposition réformatrice affirme depuis plusieurs semaines que des manifestants et des militants arrêtés étaient détenus dans des lieux secrets, craignant qu’ils ne soient victimes de tortures. Il y a plusieurs semaines, les autorités avaient annoncé qu’environ 500 personnes arrêtées durant la répression du mouvement de protestation étaient en prison. Mais les arrestations s’étaient depuis poursuivies. Une commission parlementaire enquêtant sur les conditions de détention s’est rendue à Evin, la principale prison de Téhéran, et lors de cette visite 140 personnes arrêtées en lien avec les manifestations ont été libérées, a indiqué Kazem Jalili, porte-parole de la commission. Quelque 150 autres restent incarcérées à Evin car des armes avaient été trouvées sur elles au moment de leur arrestation, a-t-il ajouté. L’identité des personnes libérées n’était pas connue dans l’immédiat. Le chef de l’appareil judiciaire iranien, l’ayatollah Mahmoud Hashemi Shahroudi, a promis que le ministère public examinerait la situation de tous les détenus arrêtés en lien avec les manifestations dans un délai d’une semaine afin de décider s’ils doivent être relâchés ou jugés, selon l’agence officielle IRNA.  Ces gestes du pouvoir sont considérés comme visant à apaiser le mécontentement de l’opposition, qui a appelé à un grand rassemblement jeudi dernier dans la capitale en hommage aux victimes de la répression des manifestations, qui a fait une vingtaine de morts selon les médias officiels. Ce rassemblement, à l’appel des deux principaux candidats malheureux du camp réformiste à la présidentielle, Mirhossein Moussavi et Mehdi Karoubi, a été interdit par le ministère de l’Intérieur, a rapporté l’agence de presse officieuse Fars. Selon des sites internet réformistes, plusieurs personnes impliquées dans les manifestations post-électorales étaient soumises au centre de Kahrizak à d’intenses pressions physiques et mentales. On ignore si elles ont été libérées ou transférées ailleurs. La répression n’aura pas eu raison de Mir Hossein Moussavi. Dans un discours prononcé devant des membres du corps enseignant, et publié, hier soir, sur Ghalamnews, son site Internet, il appelle les Iraniens à saisir l’occasion des prochaines cérémonies religieuses commémorant l’imam Mehdi pour descendre tous les soirs dans les rues. C’est la première fois que ce candidat malheureux aux élections – qui dénonce, depuis le début, l’illégalité des résultats – encourage aussi ouvertement les manifestants à poursuivre leur protestation. Camp de Khaliq Dans ce contexte, les forces de sécurité irakiennes ont pris le contrôle d’un camp des Moudjahidine du people “Khaliq”, des opposants au régime iranien réfugiés dans le nord de l’Irak, près de la frontière avec l’Iran. Selon la police, au moins 260 personnes ont été blessées lors de l’assaut du camp Ashraf, soit 200 résidents du camp et 60 membres des forces de sécurité. Une cinquantaine d’exilés iraniens ont aussi été arrêtés. Un porte-parole des Moudjahidine du peuple a pour sa part affirmé que quatre résidents avaient été tués lors des affrontements, ce que la police n’a pas confirmé. En tout, 800 soldats irakiens ont tenté de pénétrer dans le camp, mais se sont butés à une forte résistance des habitants, qui s’est rapidement transformée en émeutes. Selon des images diffusées par les opposants iraniens, des dizaines de personnes ont tenté d’empêcher l’entrée des soldats dans le camp en se massant devant l’un des portails. L’armée a répliqué en utilisant des canons à eau et des bâtons. Elle a aussi demandé l’aide des forces de police antiémeutes pour éviter l’utilisation d’armes à feu. «Après l’échec des négociations avec les Moudjahidine pour y entrer pacifiquement, l’armée irakienne a pénétré de force dans le camp et elle contrôle désormais totalement l’intérieur et les entrées du camp», a déclaré l’armée irakienne. L’Irak soutient que les exilés iraniens qui s’y trouvent ont commis des crimes, et craint que leur présence ne mette en péril ses relations avec l’Iran. Dans un communiqué, les Moudjahidine du peuple ont dit pour leur part qu’ils considéraient les forces américaines pour responsables de la protection des habitants du camp. Ils demandent au secrétaire général de l’ONU et à toutes les organisations des droits de l’Homme à «intervenir immédiatement pour mettre un terme à l’attaque des forces irakiennes». Un porte-parole du Conseil national de la résistance d’Iran (CNRI), dont les Moudjahidine du Peuple sont le bras armé, a de son côté accusé Bagdad d’avoir agi sur ordre du régime iranien.  

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