Qui pour succéder à Mahmoud Abbas ?

15-12-2011 10:12 AM


Le président de l’Autorité palestinienne a jeté l’éponge. Décision irrévocable ou coup de bluff? Quoi qu’il en soit, plusieurs noms de candidats à sa succession circulent déjà.

Coup de théâtre à Ramallah. Cinq ans après la mort du chef historique Yasser Arafat, son successeur Mahmoud Abbas, président de l’Autorité palestinienne depuis janvier 2005, annonce qu’il renonce à briguer un nouveau mandat. Officiellement, la décision du dirigeant du Fatah, 74 ans, est irrévocable. Son entourage affirme même qu’il pourrait démissionner avant l’élection présidentielle, prévue le 24 janvier 2010. Mais Israël et les Etats-Unis appellent à ce qu’il reste.

Officieusement, on murmure surtout parmi ses adversaires politiques que le président tente ici un coup de bluff. «C’est une mise en garde, un avertissement, une sorte de ‘je-vous-avais-prévenus’», suggère un haut diplomate européen. Le but de la manœuvre : mettre la pression sur la relance du processus de paix aux Etats-Unis et à Israël, qui redoutent l’arrivée d’un président moins modéré à la tête de l’Autorité palestinienne.
Selon Jean-Paul Chagnollaud, professeur de sciences politiques à l’université de Cergy-Pontoise, et spécialiste de la question palestinienne, «Mahmoud Abbas en a vraiment assez. En cinq ans, il n’a jamais rien obtenu sur le plan du processus de paix. La situation est bloquée au niveau interne depuis 2007 et la prise de contrôle du Hamas à Gaza. Et sur le plan international, Barack Obama n’a pas réussi à faire bouger les choses. Un geste américain pourrait donc l’amener à revenir sur sa décision».

Pas de successeur naturel

Reste à savoir qui, au Fatah, est susceptible de remplacer l’héritier d’Arafat et membre fondateur du mouvement. D’autant que Mahmoud Abbas reste secrétaire général de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP). Pour le moment, aucun candidat ne s’est officiellement déclaré. Mais certains ont l’étoffe et l’envie d’y aller.

A commencer par Marwan Barghouti. Très populaire en Cisjordanie aussi bien qu’à Gaza, il purge depuis 2004 en Israël une peine de prison à perpétuité pour meurtre, ce qui lui vaut le surnom de «Mandela palestinien». «C’est un personnage charismatique qui est resté très actif politiquement », estime Denis Bauchard, conseiller spécial à l’Ifri. Ex-chef du Fatah en Cisjordanie et principal leader de la seconde Intifada, sa libération a été plusieurs fois évoquée par Tel Aviv, notamment en échange de celle du soldat israélien Gilad Shalit. Sans jamais aboutir.

Autre candidat éligible : Salam Fayad, actuel Premier ministre, proche de l’administration Bush et ex-ministre des Finances. Ancien économiste au FMI et à la Banque mondiale, «c’est un vrai homme d’Etat», selon Denis Bauchard. «Il a beaucoup œuvré pour le développement économique de la Cisjordanie. Mais il lui manque une légitimité historique et une base politique car il ne fait pas partie de l’appareil de l’OLP et du Fatah».

Le Hamas en embuscade

Après avoir gagné la bataille des personnes, le candidat du Fatah devra gagner celle contre le Hamas. Car le mouvement islamiste pourrait bien jouer les trouble-fête. Il a d’ores et déjà annoncé qu’il contestait la date du 24 janvier pour tenir les élections. Elles pourraient être reportées au 28 juin, à condition que le Hamas joue le jeu. En attendant, selon Jean-Paul Chagnollaud, «un comité de transition pourrait être mis en place».

Le Hamas, renforcé politiquement après la guerre de Gaza, est quasiment au coude-à-coude dans les sondages avec le Fatah. «C’est un danger évident », confirme Denis Bauchard. «Un homme politiquement correct comme Ismaël Haniyeh (ancien Premier ministre et cadre historique du parti) est parfaitement capable de se présenter». L’ère des divisions interpalestiniennes est loin d’être révolue.

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