Qui dirigera l’Egypte?

15-12-2011 09:07 AM

Abdel Massih Felli


Enfin et officiellement, les premières élections législatives en Egypte commenceront le 28 novembre prochain, marquant le début d’un processus électoral chargé au terme duquel l’armée promet le retour à un pouvoir civil. La décision a été prise par le Conseil suprême des forces armées (CSFA), qui dirige le pays. Le scrutin pour les députés de l’Assemblée du peuple se déroulera sur trois tours, les 28 novembre, 14 décembre et 3 janvier, et cette chambre se réunira pour la première fois le 17 mars. L’élection des membres de la Choura (Sénat), la chambre haute, se tiendra également sur trois tours, entre le 29 janvier et le 11 mars. Le système électoral complexe approuvé par le gouvernement combine un scrutin de liste pour les deux tiers des sièges, et un scrutin uninominal pour le tiers restant.

Menace

La coalition électorale dirigée par le parti des Frères musulmans a menacé mercredi  soir de boycotter les législatives de novembre si la loi électorale n’est pas amendée. “Nous refusons de participer aux élections si l’article 5 de la loi électorale (interdisant aux partis de présenter des candidats pour le tiers des sièges du Parlement) n’est pas annulé”, a affirmé un communiqué publié au terme d’une réunion des partis membres de “la coalition démocratique” qui comprend une trentaine de formations dont notamment le Parti de la liberté et la justice issu des Frères musulmans et le Parti libéral al-Wafd. La loi électorale promulguée par un décret de l’armée mardi dernier prévoit “l’élection des deux tiers des députés des deux chambres selon un mode de scrutin de listes fermées à la proportionnelle, et le dernier tiers par scrutin uninominal” réservé aux indépendants. L’article 5 de ce décret stipule que seuls les indépendantes pourront se présenter au tiers des sièges qui seront élus selon le mode uninomimal et qu’une fois élus les députés indépendants ne pourront pas se joindre au bloc parlementaire d’un quelconque parti sinon ils perdront leurs sièges. Ce système électoral mixte fait déjà l’objet d’une vive polémique depuis plusieurs semaines. Le scrutin uninominal est accusé par de nombreux partis politiques de favoriser le retour de personnalités proches de l’ancien pouvoir, qui pourraient se faire élire comme “indépendants” en bénéficiant de leurs réseaux locaux toujours puissants.

Davantage de préparation

Par ailleurs, 22 partis politiques ont demandé au Conseil suprême des forces armées (SCAF) de reporter les élections législatives de six mois pour davantage de temps de préparation. Dans une déclaration rendue publique, les leaders et les représentants de ces partis ont préconisé de profondes discussions avant de promulguer la loi électorale amendée. Ils ont menacé de boycotter les élections si le CSFA ne satisfait pas leurs demandes. Par ailleurs, des dizaines de partis, allant des salafistes (islamistes fondamentalistes) aux libéraux, souvent très peu structurés et encore mal connus, sont apparus après la chute du régime Moubarak. La campagne et les résultats des Frères musulmans, réputés le mouvement le mieux organisé d’Egypte, seront également suivis de près. La confrérie a formé son propre parti pour pouvoir se présenter en tant que formation politique, mais a promis de ne présenter de candidatures que pour la moitié des sièges en lice. Selon le projet de loi électorale amendé, le nombre d’élus passera de 504 à 498 pour l’Assemblée du peuple, et de 390 à 270 pour la Choura. Le futur parlement égyptien sera chargé de rédiger une nouvelle constitution pour le pays.

Système électoral complexe

La date de l’élection présidentielle, à l’issue de laquelle l’armée a promis de remettre la totalité du pouvoir aux civils, n’est pas encore connue. Les militaires au pouvoir en Egypte ont accepté de modifier les règles des élections législatives qui débutent en novembre afin d’augmenter la proportion de parlementaires élus au suffrage proportionnel de liste. Certaines formations politiques demandent au Conseil suprême des forces armées (CSFA), qui pilote la transition en Egypte, d’organiser le vote exclusivement selon un scrutin de liste afin d’empêcher des représentants de l’ancien régime de se faire élire individuellement au Parlement. Les militaires sont convenus de faire passer de 50% à deux tiers la proportion de parlementaires élus au scrutin de liste. Le CSFA a transmis cette proposition au gouvernement afin qu’il l’examine et donne son aval. L’armée égyptienne a promis que les prochaines élections ne se dérouleraient pas sous le régime de la loi d’état d’urgence. Si une nouvelle constitution devait être adoptée en préalable, le vote pour le prochain président pourrait ne pas intervenir avant la fin août 2012. 

35% soutiennent la confrérie 

Trente-cinq pour cent des Egyptiens disent soutenir la confrérie islamiste des Frères musulmans et 58% n’éliraient pas un président de confession différente, révèle un sondage publié par l’agence officielle Mena. Le sondage a été réalisé par le Centre d’information et de soutien à la prise de décisions (IDSC), qui dépend du conseil des ministres. “Selon le sondage, 35% des Egyptiens soutiennent la confrérie des Frères musulmans tandis que 21% s’y opposent”. Parallèlement, “58% des Egyptiens se sont dits opposés à élire un président de la République qui ne soit pas de leur religion”. En revanche, une proportion similaire (60%) des personnes interrogées est disposée à élire un député qui ne serait pas de la même confession.

Les trois-quarts des Egyptiens considèrent la population du pays comme religieuse (73%) et refusent que la religion ne soit pas mentionnée sur la carte d’identité (76%). Enfin, 78% estiment que la relation entre chrétiens et musulmans en Egypte n’est pas problématique, et 50% jugent que des “éléments extérieurs” sont la cause des derniers incidents confessionnels. 

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