L’Egypte souffre de la panique sur le marché mondial du blé

15-12-2011 09:06 AM

Abdel Massih Felli - Michael Victor


Après la crise financière, la crise alimentaire? On n’en est pas encore là, mais la hausse du prix du blé fait affleurer ce spectre depuis que la canicule et la sécheresse sévissent en Russie. En effet, ce pays est le troisième plus gros exportateur mondial de blé. La décision de la Russie d’imposer un embargo sur ses exportations de blé, commence à susciter les inquiétudes de l’Egypte, le blé étant l’un des principaux aliments de base particulièrement en ce mois de ramadan. Redoutant le scénario de l’année 2007 lorsque le prix du blé avait flambé pour atteindre 500 dollars la tonne, soit le double du niveau actuel, les autorités égyptiennes assurent avoir pris une série de mesures pour remédier à cette situation de crise. Trouver de nouvelles sources d’approvisionnement et accroître les subventions gouvernementales, telles sont les principales mesures annoncées dans l’immédiat par les autorités égyptiennes qui qualifient de “temporaire” cette hausse, expliquée par “la précipitation des acheteurs, et non par une vraie pénurie des stocks mondiaux”.  Bien que les autorités officielles se veuillent rassurantes quant aux réserves stratégiques de quatre mois dont dispose l’Egypte, le gouvernement tente, tant bien que mal, de trouver des solutions urgentes pour sortir de cette impasse, dont les répercussions sur le budget de l’Etat sont énormes. “Le blé est en abondance. On va juste le payer un peu plus cher”, renchérit le président de la Chambre des industries des grains, Ali Charafeddine, qui relève que le blé russe est environ 30 pc moins cher que le blé français, argentin, américain ou australien. L’Egypte compte parmi les premiers pays concernés par cet embargo du fait qu’elle dépendait de plus en plus du blé russe “bon marché”. Quelque 540.000 tonnes de blé russe qui devaient servir à produire du pain subventionné ne seront donc pas livrées.   Selon des chiffres officiels, la tonne variait entre 200 et 230 dollars au moment où le blé français dépassait les 270 dollars. Ainsi, le principal problème conséquent à la décision russe serait d’ordre budgétaire. Au total, ces changements devraient avoir un impact de 400 à 700 millions de dollars sur le budget égyptien pour l’année 2010/2011, qui a débuté le 1er juillet. Pour remédier à cette situation, le ministre égyptien du Commerce et de l’Industrie, Rachid Mohamad Rachid a annoncé récemment avoir réclamé une hausse des allocations étatiques consacrées à l’Organisme des produits d’approvisionnement variant entre 2.5 et 4 milliards de L.E.   Tout en relevant l'”inquiétude” de la population des conséquences de cette situation durant le mois de ramadan, marqué traditionnellement par une hausse de la consommation de pain, le ministre a toutefois assuré que cela n’aurait “pas d’impact” sur la période du mois sacré. L’Organisme des produits d’approvisionnement, chargé de l’achat du blé utilisé pour la production du pain subventionné, a lui aussi annoncé avoir acheté 240.000 tonnes de blé français à livraison en septembre. “Il y a des tentatives pour convaincre les Russes de remplir les accords signés avant l’embargo”, ajoute le président de la Chambre des industries des grains, qui assure qu’il ne s’agit pas “vraiment d’une crise”. “Il y a un surplus de production cette année, la Russie souffre d’une pénurie de 19 millions de tonnes, mais il existe une hausse de la production américaine de 30 millions de tonnes”, a-t-il expliqué.  Inquiétudes  La FAO, l’organisation de l’ONU pour l’alimentation et l’agriculture, a manifesté ses inquiétudes devant les risques de pénurie dans le monde, dans un communiqué diffusé avant l’annonce de l’embargo russe, un communiqué dans lequel la FAO a réduit d’environ 4%, soit 25 millions de tonnes, sa prévision de récoltes mondiales de blé pour 2010. La plupart des observateurs se montrent encore prudents. Certains jugent la situation “sérieuse”, d’autres estiment qu’il faut attendre les récoltes des prochaines semaines, notamment en Europe, dans le Caucase et en Australie, pour se prononcer. Toutefois, le scénario ne saurait être tout à fait identique, de nombreuses variables étant aujourd’hui plus rassurantes. Il n’en demeure pas moins que plusieurs signaux inquiètent. La sécheresse en Russie, en Ukraine et au Kazakhstan; les trop fortes pluies au Canada, en Inde et au Pakistan; enfin, les rendements affectés en Europe: les récoltes de blé s’annoncent nettement inférieures aux prévisions. L’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) les a abaissées de 24 millions de tonnes, à 651 millions de tonnes. Et tout indique que ces estimations devront être revues à la baisse. Parmi les gros producteurs, seuls les Etats-Unis devraient connaître une bonne année. 
Importation de céréales
La Russie envisage pour cette année de revenir à la pratique soviétique d’importation de millions de tonnes de céréales alors que la sécheresse record de cet été l’a poussée à réduire nettement ses prévisions de récolte,a rapporté jeudi le quotidien économique russe Vedomosti. La Russie envisage pour cette année de revenir à la pratique soviétique d’importation de millions de tonnes de céréales alors que la sécheresse record de cet été l’a poussée à réduire nettement ses prévisions de récolte, rapporte jeudi le quotidien économique russe Vedomosti. Pour l’année 2010-2011, la Russie pourrait importer au moins cinq millions de tonnes de céréales, a indiqué au journal une source proche du ministère de l’Agriculture. Troisième exportateur mondial de blé et l’un des premiers exportateurs mondiaux de céréales, la Russie a perdu, selon le président russe Dmitri Medvedev, près d’un quart de ses cultures de céréales en raison de la sécheresse et de la canicule qui frappent le pays depuis juillet. Selon la source de Vedomosti, la Russie a déjà pris la décision d’importer des céréales mais doit encore décider dans quelle quantité.
La Russie pourrait notamment importer des céréales du Kazakhstan, qui prévoit d’exporter huit millions de tonnes de céréales cette année sur une récolte comprise entre 13,5 et 14,5 millions de tonnes. Le 5 août, Moscou avait annoncé un embargo sur ses exportations de céréales jusqu’à la fin de l’année, afin d’assurer la demande domestique et d’éviter une envolée des prix. Néanmoins, cette mesure a provoqué un emballement des prix du blé sur les marchés financiers mondiaux. L’année dernière, le pays avait exporté 21,4 millions de tonnes de céréales et lancé une importante campagne pour augmenter ses parts de marchés à l’international. Au début des années 1980, les maigres récoltes avaient poussé l’Union soviétique à importer de larges quantités de céréales de l’étranger, augmentant ainsi sa dette internationale.
 legende
Une moissonneuse-batteuse dans un champs de blé à Meshcherskoye au sud de Moscou

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