Le référendum qui a divisé les Egyptiens

15-12-2011 09:07 AM

Abdel Massih Felli


Le chef de la Ligue arabe, Amr Moussa, qui entend se présenter à la présidence égyptienne, a formellement confirmé mercredi qu’il appelait à voter “non” au référendum qui a eu lieu, hier samedi pour amender la Constitution après la chute du président Moubarak.”Rejeter les changements constitutionnels est la bonne décision à prendre pour les électeurs qui se sont rendus aux urnes”, a-t-il déclaré dans un communiqué.
 “Va voter et dis NON”
Les Egyptiens sont allés, hier samedi à se prononcer sur des amendements à la Constitution. 45 millions d’électeurs ont le droit de voter. Plusieurs forces politiques estiment que ces amendements sont insuffisants et appellent à voter non. La coalition des jeunes de la révolution, à base du soulèvement populaire contre le régime Moubarak a invité lundi les Egyptiens à voter “non”. “Nous disons va voter et dis non’’. <<Nous voulons une nouvelle constitution et le prolongement de la période de transition avec la création d’un conseil présidentiel», a déclaré Chady Ghazali Harb, membre de la coalition.  Pour Moussa, les changements “ne répondent pas aux ambitions du peuple égyptien qui rêve d’une ère démocratique” après trente années passées sous le régime autoritaire de Moubarak. Un vote positif lors du référendum de samedi permettrait selon lui, en maintenant l’essentiel de l’ancienne Constitution, au chef de l’Etat de garder les vastes pouvoirs dont profitait le président déchu, et donc courir le risque de retrouver un régime analogue. “Garder l’ancienne Constitution donnerait au futur président de vastes pouvoirs, ce à quoi le peuple s’oppose dans sa quête de démocratie, de liberté et de refus de revenir à l’ancien ordre des choses”, a affirmé Moussa.
 Ce référendum a visé à modifier plusieurs articles de la Constitution héritée de l’ère Moubarak, afin notamment de limiter toute présidence à deux mandats de quatre ans, contre un nombre illimité de mandats de six ans, et à assouplir les conditions de candidature. De nombreux partis et mouvements d’opposition ont estimé toutefois que les changements ne vont pas assez loin et que ce référendum, cinq semaines à peine après le départ de Moubarak, est organisé à la hâte. L’armée égyptienne, dépositaire du pouvoir depuis le départ du président, espère quant à elle que ces changements permettront d’organiser comme promis dans les prochains mois des élections législatives et présidentielle libres, en vue d’un retour rapide à un pouvoir civil.  L’autre candidat à la présidence, Mohamed El-Baradei, ancien Directeur général de l’Agence internationale de l’énergie atomique (Aiea) a également déclaré son opposition au référendum d’hier. El-Baradei a, quant à lui, demandé la formation d’un “Conseil présidentiel” formé de deux civils et d’un militaire qui géreraient le pays pendant une période de transition de deux ans pendant laquelle une assemblée constituante serait formée pour élaborer une nouvelle constitution.  Les islamistes disent “oui” Pratiquement seul le mouvement des Frères musulmans, la force la mieux organisée du pays, s’y est déclaré favorable. La confrérie islamiste des Frères musulmans, mouvement d’opposition le plus organisé, a par ailleurs appelé a voter “oui”. Selon Mohamed Mursi, un haut  responsable de la Confrérie  “les amendements constitutionnels ne sont pas suffisants pour satisfaire les revendications de la révolution et des révolutionnaires mais le pays passe par une étape critique qu’il faut dépasser par le biais de ces amendements, afin de passer d’une période de transition à une période de stabilité”. Toutes les forces islamistes ont appelé le peuple égyptien ainsi que leur partisans afin de voter “oui”. Le mouvement des Frères musulmans a estimé pour sa part, que les amendements proposés sont suffisants pour gérer la période de transition jusqu’au retour de la stabilité. Le fondateur du parti Karama (dignité) et candidat à la présidence, Hamdine Sebahi a qualifié les amendements de « bons », craignant qu’un vote négatif ne remette à l’ordre du jour l’ancienne constitution en panne ou ne mène à l’élaboration d’une nouvelle constitution, ce qui rallongerait la période de transition.  Nouvelle expérience démocratique De sa part, le conseil suprême des forces armées a appelé sur sa page officielle Facebook, les Egyptiens à se rapprocher des commissions du référendum pour “enrichir cette expérience démocratique qui sera retenue par l’Histoire”. L’armée a d’autre part, mis en garde contre l’organisation de marches ou de rassemblements afin de réunir toutes les conditions nécessaires à l’organisation du référendum. Cependant, les avis des partis et personnalités politiques restent partagés à ce sujet. Mamdouh Chahine, vice-ministre de la défense aux affaires constitutionnelles et judiciaires, membre du conseil suprême des forces armées a indiqué que les 9 articles amendés s’inscrivent au titre d’une constitution provisoire dans l’attente de l’élaboration de la nouvelle après élection du nouveau président.  Des militants et des académiciens égyptiens comptent organiser un mouvement de protestation pour dénoncer ces amendements.  En cas de  refus, comment agir? L’armée égyptienne agira par décret pour organiser la transition politique en Egypte en cas d’échec du référendum sur la réforme de la Constitution, a déclaré le chef de l’instance de supervision de ce vote. Si les modifications constitutionnelles “sont rejetées, nous serons face à un vide législatif, qui sera comblé par un décret du conseil suprême des forces armées (CSFA)”, a déclaré à la presse le président de la Haute commission judiciaire pour le référendum, Mohamed Atteya. Ce décret devrait prendre la forme d’une “déclaration constitutionnelle limitée” destinée à déterminer la marche à suivre durant une “période de transition menant à une nouvelle autorité et un Etat moderne et civil”, a-t-il ajouté. Il n’a pas donné plus de détails sur le contenu de cette “déclaration”, se bornant à indiquer qu’elle fixerait la “teneur des étapes suivantes.   

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