Le père Bichoy Kamel, un flambeau au service de l’église

15-12-2011 09:05 AM

Laura...


J´étais à Alexandrie dimanche dernier pour une mission de presse. Par hasard, ma résidence était à quelques mètres de l´église saint Georges à Sporting. En la contemplant par la fenêtre de ma chambre  je l´ai  aperçue toute illuminée. Je fus remplie de joie et de paix . Je me suis souvenue immédiatement que Watani Francophone avait publié ce jour-là la peinture de saint Georges en commémoration de son martyr célébré le 1er mai. J´ai senti alors que ce n´est pas le hasard mais plutôt l´appel de Dieu. J´ai fermé la porte et je me suis dirigée vers l´église dans l##espoir de rencontrer Tasoni Angèle, l´épouse du défunt père Bishoy Kamel. Il était tard, l´église étaient remplie d##invités d´un mariage. Rêve inespéré! Je n´arrivais pas à monter l´escalier pour visiter l´église. En  attendant que la foule soit moins dense je me suis promenée dans la cour  de l´église. Quelle surprise de me trouver devant une chambre illuminée: c´était le mausolée où repose le défunt père Bichoy ! Je croyais que le saint  père était enseveli dans l´église. J´ai vite ôté mes souliers et je suis entrée en silence .Devant  moi se trouvait une dame petite de taille, habillée  toute  en blanc : c´était Tasoni  Angèle… Quelle joie! Ce n´était pas le hasard mais plutôt la volonté de Dieu qui m´a guidée vers elle. En effet je souhaitais la voir depuis que notre collègue  Michael Victor l´a interviewée. C´était le premier interview qu´elle a accepté d´accorder.
Pour  mieux la connaître et pour expliquer pouquoi je l´ai tant aimée, je vous invite à lire le reportage publié en arabe par Watani l´année dernière.                                                                                                    Entretien Michael Victor  J’ai téléphoné à Tasoni Angèle et elle m’a surpris en acceptant de m’accorder une interview, alors qu’elle refusait cela auparavant.
Elle m’a accueilli et m’a parlé en détail de sa vie. Je sentais auprès d’elle une paix et une joie intérieures. Selon elle, ses moments les plus joyeux sont ceux où elle parle du père Bichoy. C’est une femme simple, humble, tendre et aime tous les fidèles de l’église. Elle a vécu vierge avec le père et n’a pas eu d’enfants. Cependant, elle considère yous les fidèles de l’église comme ses enfants. Comme un de ses fils, elle m’a invité à s’asseoir près d’elle sur le lit du père Bichoy. Avec une voix angélique, elle m’a parlé avec un sourire délicat qui n’a pas quitté ses lèvres. Je me suis assis près d’elle pendant de longues heures mais le temps a passé vite car il est facile de parler avec elle.   Question: Parlez-nous tout simplement du père. Réponse: Le père Bichoy est né le 6 décembre 1931 à Damanhour – Beheira. Il s’appelait Sami Kamel Ishak. Il a décroché son baccalauréat de sciences, section géologie, université d’Alexandrie, en 1951. il a travaillé comme professeur de chimie à l’école secondaire de Ramley pour garçons. Il a ensuite décroché la licence de lettres, section philosophie, en 1954. Simultanément, il a adhéré à la faculté ecclésiastique d’Alexandrie et a décroché le baccalauréat de sciences théologiques en 1956. Il était le premier de sa promotion.  Q: Quand est-ce qu’il a commencé son service? R: Il a commencé son service en 1948 à 17 ans, alors qu’il était encore étudiant. Il a servi à l’éducation ecclésiale en l’église de la Vierge Marie à Moharram bey. Il réussissait toujours dans ses études et son service.  Q: Pensait-il effectivement à la vie monastique? R: Vers la fin décembre 1954, pendant la période du jeûne de la Nativité, il s’est trouvé attiré par la vie de consécration à la vie monastique et a commencé à s’y préparer. Il s’apprêtait à partir au monastère, mais son père tomba malade soudainement. Il a dû alors reporter son projet qui demeurait vif en son esprit. Il allait en effet toujours aux monastères.  Q: Comment a surgi sa vocation? R: Précisément dans la soirée du mercredi 18 novembre 1959, Sami (le père Bichoy) est allé pour recevoir les bénédictions du pape Cyrille VI. A ce moment, le pape discutait avec un des pères d’une parcelle de terrain que le patriarcat d’Alexandrie a achetée sur la ligne du tramway à Sporting pour y ériger une église portant le nom de Saint Georges. Le pape a dit que “nous ne pourrons pas commencer la construction de l’église avant de lui avoir ordonné un prêtre”. Le pape connaissait bien Sami. Il posa alors la croix sur sa tête et lui dit: “c’est une signe de Dieu Sami que tu deviennes prêtre. Je vais t’ordonner pour l’église Saint Georges à Sporting”.  Q: Comment avez-vous connu le père? R: Je ne le connaissais pas du tout. Tout ce que je t’ai raconté je l’ai appris plus tard. J’entendais seulement parler de sa grande activité dans l’église. Il connaissait bien mes frères et mon père. Cependant, j’étais moi aussi attiré par la vie virginale. Quand le père a été appelé  au sacerdoce, il m’a demandée en mariage de mes frères qui en furent ravis. Par mon mariage, j’ai réalisé mon rêve de vie virginale car lui aussi aspirait à la vie monastique et il a vécu comme consacré et prêtre en même temps. La messe du mariage a eu lieu dans la soirée du mardi  24 novembre 1959. C’était vraiment la volonté de Dieu d’avoir choisi une compagne de vie et de service pour vivre ensemble une vie virginale comme nous sommes convenus avant le mariage.  Q: Quels souvenirs gardez-vous de la vie sacerdotale du père? R: Le père a été ordonné prêtre au nom de père Bichoy le mercredi 2 décembre 1959 sur le sanctuaire de l’église Saint Georges à Sporting. A ce moment, l’église n’était qu’un petit bâtiment en briques rouges, sans peinture. Son toit était fait de tissus de tentes. Après la consécration, le père est allé au monastère de la Vierge Marie des Syriens où il a séjourné pendant les 40 jours que le prêtre doit passer au début de sa vie sacerdotale. Il est ensuite retourné au monastère avec une vigueur extraordinaire et une grande force. Il a entrepris la construction de l’église qui fut consacrée en 1968. Elle est devenue de nos jours une des plus célèbres d’Alexandrie. Le père était illimité au service sacerdotal. Ce dernier s’étendait, ce qui l’a rendu responsable du service de toute la ville d’Alexandrie. Malgré son humilité et sa grande bonté, il était un flambeau dans son service. Il a fondé 7 églises à Alexandrie: saint Georges à Hadara, l’Archange Michel à Moustafa Kamel, l’Anba Takla Himanot à Ibrahimiya, Saint Marc et le pape Pierre, dernier des martyrs à Sidi Bichr, la Vierge et le pape Cyrille, pilier de la religion à Cléopâtre, l’Anba Antoine at l’Anba Bichoy dans le quartier d’El-Labbane. Il était vraiment actif dans son service, étant conscient de sa mission sacerdotale et pastorale. Il devint une lanterne rayonnante et il disait toujours aux serviteurs: “Vous devez toujours aspirer au service. Ce dernier n’est ni un travail ni un devoir”.  Q: Il est clair qu’il se fatiguait beaucoup dans son service. Ne vous souvenez-vous pas s’il vous a demandé un jour de se reposer? R: Jamais. Je sentais une grande joie pour son service, même s’il était fatigué. Il servait plus vigoureusement et je ne lui disais rien. Je me disais: “Quelle chance le père a en servant le Christ”. Je ne me ne gênais jamais quand il rentrait tard à la maison. Il restait à l’église pour résoudre des problèmes jusqu’à l’aube et il n’y avait pas de moyen de communication à ce temps-là. Tout ce que je faisais c’est de prier à la Sainte Vierge de le garder. J’étais préoccupée pour lui, non pas parce que j’étais gênée ou fâchée, mais parce que j’avais peur pour lui bien que je sois convaincue qu’il servait Jésus et j’étais heureuse que sa vie est toujours avec Dieu.  Q: Comment est-ce que le père Bichoy passait sa journée? R: Il est très difficile de parler d’un jour dans la vie du père car chaque jour était différent de l’autre. Il rendait visite à des malades, faisait retourner à Dieu de nombreuses âmes perdues. Il rendait visite aux familles et aux frères nécessiteux. Chaque jour son service augmentait d’une manière anormale, mais on peut dire que le père s’intéressait beaucoup aux visites des malades, et particulièrement les cancéreux et les cardiaques.   Q: Quel est le secret de l’intérêt que le père accordait aux visites des malades? R: Le père avait peur que l’ennemi du bien vienne chez le malade et et le trouve révolté contre sa maladie. Il disait que c’est dommage de perdre une de ses couronnes. Il portait toujours aux malades la photo du Christ crucifié et lui parlait du paradis et de la vie éternelle. Il leur disait que ses douleurs sur la terre sont pour lui une grande gloire au Ciel et il ne quittait le malade qu’après l’avoir rendu heureux et aspirant au moment de son passage à l’au-delà.  Q: Quel est le service du père à l’étranger? R: 11 ans après sa consécration, le père a été chargé par le pape Cyrille VI de partir pour servir aux Etats-Unis. Le père est considéré comme faisant partie du premier groupe de prêtres envoyés par Sa sainteté le pape pour servir dans les pays d’émigration. Nous n’avions pas alors des églises coptes pour y prier. Pendant 6 mois, nous priions dans une église syrienne. Dieu a permis et nous avons acheté deux églises: une à Los Angeles en 1970 et une autre à New Jersey en 1974. Le père se déplaçait d’un Etat à l’autre et ne prenait pas de répit. Il rendait visite à toutes les familles coptes immigrées pour les raffermir dans la foi par ses enseignements spirituels. Même à l’étranger, il servait honnêtement. Il avait une grande popularité auprès des fidèles de l’église aux Etats-Unis. Ils aimaient le père d’une façon extraordinaire car il parlait avec eux comme à des amis de longue date. Simultanément, il observait strictement les rituels de l’église et refusait tout changement quelles que soient les circonstances.  Q: Que voulez-vous dire par cette dernière phrase? R: En vérité, quand nous sommes allés aux Etats-Unis, il y avait des gens qui priaient “à l’américaine”. Ils voulaient transformer l’église en un style américain. C’est-à-dire par exemple la séparation des hommes et des femmes dans deux rangées dans l’église. Je lui disais que c’était inutile. Cependant, il refusait catégoriquement, disant que c’est un rituel de l’Eglise depuis le temps des Apôtres et il n’a jamais changé d’avis. Cependant, il discutait avec eux gentiment et je restais silencieuse priant que Dieu mette les bonnes paroles dans sa bouche et qu’Il lui donne la force et la sagesse de son Esprit Saint.  Q: Est-ce que le père a demandé d’avoir le cancer? R: Le père n’a pas du tout demandé d’être malade. Sa relation avec Dieu était méthodique. Il obéissait aux ordres divins. Il disait: “Ne demandez pas la croix de la maladie ou n’importe quelle autre croix car il est possible que vous ne puissiez pas la supporter, et alors qu’est-ce que vous aurez gagné? Il enseignait aux gens de se plier à la volonté de Dieu et de Le remercier quand il donne une épreuve.   Q: Quand est-ce que le père s’est senti mal? R: Précisément en août 1976, le père était en voyage pour une mission pastorale au Canada. Il ressentit de fortes douleurs au cou et ses douleurs ont persisté pendant un mois. Après qu’il est retourné en Egypte, ses douleurs se sont accentuées. Nous avons découvert qu’il s’agit d’un cancer dans la colonne vertébrale. Quand le disc faisait pression sur le nerf du cou, une douleur insupportable se produisait. Cependant, Dieu avait accordé au père une grande capacité à supporter. C’est ainsi qu’il tolérait sa croix avec gratitude et patience. Même lorsque la maladie s’est transmise à d’autres parties du corps et qu’il a perdu son œil droit, il supportait tout avec gratitude. Il était ravi de sa maladie qu’il appelait “maladie du paradis”. Quant à moi, c’était le contraire. Il se disait sous soins de Dieu et malgré ses  douleurs, c’était lui qui me consolait. Après sa mort, j’ai lu dans ses mémoires: “Je vous remercie Dieu car vous prenez soin de moi et ne m’avez épargné ni la douleur ni la maladie”.  Q: Que dites-vous des derniers instants de la vie du père? R: Le mardi 20 mars 1979 à 11 heures, le père m’a dit: “J’ai soif”. Je suis allée immédiatement lui apporter un verre d’eau, mais j’ai constaté qu’il buvait rapidement d’une façon anormale. J’ai appelé les médecins qui se trouvaient à la maison pour prendre soin du père. Ils sont accourus et j’ai compris que c’était un signe d’agonie. Je me suis assise près de lui et il m’a dit: “Tasoni, ne quitte pas le service”. Il m’a demandé de lui amener les pères Matta et Tadros du salon pour l’extrême onction. Il leur donna le grand commandement avant de s’éteindre: “Gardez l’esprit de l’Eglise unie et du cœur intègre”. La nouvelle de l’agonie du père s’est répandue et la maison est devenue bondée. Le père a béni ses fils, après quoi son âme est montée au ciel en paix à 8 heures du matin, mercredi 21 mars. A ce moment, j’ai vu ce que racontait le père aux malades toute sa vie, concernant les liuanges, l’accueil par les Cieux de l’âme pure, avec les anges et les saints. Je n’ai pas entendu un seul cri dans la maison et j’ai dit à tous: “Ne le gênez pas, pas de cri”. J’ai commencé à faire les louanges alors que les masses affluaient à la maison. Il n’y avait pas assez de place et nous avons été obligés de transporter son corps pur à l’église. A ce moment, nous avons appris que sa Sainteté le pape Chenouda III allait venir le lendemain, le 22 mars, pour prier sur le corps du père. Je me suis dit: “Je ne vais pas rester tout ce temps à regarder les gens qui viennent crier. J’ai porté mon évangile dans ma main et je me suis assise à ses pieds pour y verser un baume et lire les Ecritures saintes. Le lendemain à midi, Sa Sainteté le pape Chenouda est venu et  a présidé la messe funèbre.  Q; Pourquoi avez-vous choisi des habits blancs pour faire vos adieux au père Bichoy. Vous a-t-il recommandé cela? R: Le père ne m’a rien recommandé à ce sujet. Il ne s’agit que de rumeurs. Ce jour-là, j’ai ressenti une paix surnaturelle. Je croyais que le père était accueilli d’une manière grandiose au ciel avec des louanges et des vêtements blancs. Je me suis dit que je ne m’oppose pas à la joie des Cieux et je me suis vêtue en blanc pour partager la joie des anges. Je ne me suis pas préoccupée de ce que les gens diront. Tout ce dont je me souciais, c’était de partager la joie céleste.  Q: N’avez-vous pas pensé changer la couleur de vos vêtements depuis lors? R: Le troisième jour après la disparition du père, l’évêque de Damiette, l’Anba Bichoy, est venu chez moi alors que j’allais acheter des vêtements noirs, non par peine pour la mort du père, mais comme signe de pudeur et de prestige. A ce moment, monseigneur m’a dit: “La plus grande chose qui nous a consolés ce sont vos vêtements blancs Tasoni”. Je lui ai alors répondu: “Monseigneur je ne les ai pas portés de mon gré, mais je n’ai pas voulu m’opposer à la joie des Cieux lors du décès du père. Mais j’allais acheter aujourd’hui des habits noirs”. Il m’a alors dit: “Pourquoi donc porter du noir? Restez comme vous êtes”. Depuis ce jour, je garde mes vêtements de “joie”.  Q: Qui est l’intercesseur du père? R: Le père aimait tous les saints. Cependant, il avait une grande relation spirituelle avec la Vierge Marie et le grand Saint Georges. Il les invoquait continuellement.  Q: Qu’est-ce qui réjouit le plus Tasoni de ce qui a été dit sur le père? R: Deux mots: Le pape Chenouda a dit qu’il est une école et Sa Sainteté a écrit dans ses éloges qu’il est sans aucun doute un saint.  Q: Aspirez-vous à rendre visite au père dans son mausolée? R: Je lui rend visite une ou deux fois par jour.  Q: A quoi vous êtes attachée jusqu’à présent concernant la vie du père? R: J’observe tous les enseignements du père. Ses enseignements régissent ma vie.  Q: Qu’est-ce qui gêne Tasoni? R: Que je trouve dans les maisons de méditation des piscines. Je sers ma préparation et dans notre méditation, nous ne faisons rien d’autre que les louanges, la prière, l’étude du Livre et la récitation des psaumes. C’est le vrai sens de la méditation.  Q: Que dites-vous au père en sa commémoration? R: J’aspire à te rencontrer au paradis et que Dieu nous vienne en aide comme il t’a aidé. 

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