Mars, mois du printemps, de la Journée de la femme et des mères en Egypte. A cette occasion Watani Francophone a choisi d’exposer le 12e Printemps des Poètes qui s’est déroulé en France et en Europe, du 8 au 21 mars 2010 ayant pour thème “Couleur femme”. Ceci est accompli en traitant d’une poétesse, romancière et auteur dramatique qui a réussi à occuper une place parmi les auteurs français de la création contemporaine. A savoir Andrée Chédid.
Chédid et la condition humaine
« Disons-le sereinement, en poésie comme dans les autres domaines artistiques, la femme a le plus souvent été cantonnée à un rôle subalterne : muse, confidente, consolatrice… La valeur péjorative de l’appellation « poétesse » en dit plus que de longs discours. La question n’est pas de débattre s’il y a ou non une poésie féminine. La question est de mettre en lumière l’apport, à travers l’histoire, des femmes poètes et leur présence remarquable dans la création contemporaine. Ce pourra être aussi l’occasion de considérer les représentations du féminin dans l’imaginaire poétique, au-delà des stéréotypes de la célébration amoureuse. ». Il s’agit en fait de traiter de la fameuse poétesse Andrée Chédid dont les œuvres sont un questionnement ardent sur la condition humaine, les liens qui tissent l’individu au monde. D’ailleurs tous ses livres sont habités d’un espoir et d’une foi profonde en l’homme. La poétesse affirme elle-même disant : « J’écris pour essayer de dire des choses vivantes qui bouillonnent au fond de chacun ; j’espère ainsi communiquer. Les sujets que je choisis sont en général marqués par la tragédie et par l’espérance. Je veux garder les yeux ouverts sur les souffrances, le malheur, la cruauté du monde ; mais aussi sur la lumière, sur la beauté, sur tout ce qui nous aide à nous dépasser, à mieux vivre, à parier sur l’avenir.».
Née en Égypte mais d’origine syro-libanaise, Andrée Chédid est mise en pension chez les Sœurs du Sacré-Cœur à l’âge de 10 ans. Elle apprend l’anglais et le français mais exprime sa tendresse en mots arabes. A 14 ans, elle gagne l’Europe puis revient au Caire pour étudier à l’Université américaine. En 1942, elle part vivre au Liban avec son mari et publie l’année suivante un premier recueil de poèmes en anglais. En 1946, elle s’installe définitivement à Paris où elle explore tout genre littéraire. Pour y avoir vécu et fait des études, elle connaît aussi intimement le Moyen-Orient que la France et l’Occident en général, et son œuvre entière porte les marques de ce multiculturalisme. A l’exemple de ses nouvelles « Le Corps et le Temps », en 1979, et dans son théâtre « Bérénice d’Egypte » en 1968. Ainsi, c’est à Paris qu’elle s’ébauche ainsi une œuvre patiente aux visages multiples : fastueuse et indéniablement sensuelle dans ses descriptions de l’Orient, voix intime qui aborde respectueusement les êtres, écriture déchirée et âpre qui se moule à la dureté de la guerre civile au Liban.
Romancière, nouvelliste, dramaturge et surtout poète, les nombreux ouvrages en prose ou en vers ont valu à Andrée Chédid d’importants prix littéraires, dont le Goncourt de la nouvelle, le Prix Louise Labé et le Prix Goncourt de poésie en 2003, le Grand Prix de la Société des Gens de Lettres et le Prix Mallarmé.
Dans “Au cœur du cœur”, qui rassemble les plus beaux poèmes de son œuvre, Andrée Chédid reprend tous ses thèmes de prédilection : la mort, la violence et l’exil, et surtout l’espérance et la liberté. Bref, l’éternelle quête d’une humanité.
Autant de thèmes qui ne sont pas étranges à Andrée Chédid qui avant tout, est une femme de notre temps. Ses écrits restent jeunes dans le plein sens du terme.
« Avancer, reprendre joie, défier l’obstacle, peut-être le vaincre, puis aller de nouveau: tels sont nos possibles » s’exprime-t-elle dans une sorte d’art poétique qui est aussi art de vivre intitulé ” Terre et Poésie ” dans le recueil “Visage Premier” (1972). Toujours active aujourd’hui dans le monde des lettres, elle a publié récemment des poèmes réunis sous le titre “Territoires du souffle” (1999) et un roman, “Le Message (2000)”, tous deux aux éditions Flammarion.
Loin du sens militant du terme « féministe », les héroïnes d’André Chédid dans ses œuvres, s’inscrivent dans le mouvement solidaire du monde contemporain.
Dans le même ordre d’idées, Andrée Chédid ne croit pas qu’il existe une écriture spécifiquement féminine.
Vision cosmique, Libération, Energie vitale et Pouvoir de la Parole. Le tout s’interpénètre et coexiste dans chacune des ouvrages d’Andrée Chédid, qu’il s’agisse de poésie, de récits ou de théâtre.
Entre Nil et Seine, toujours attentive au visage de “l’Autre”, Andrée Chédid loue l’exil, qui peut être gage d’audace et de liberté.
Un récent article du Nouvel Observateur titre: ” Les Chédid. Une famille en or “, évoquant à la fois le grand talent de l’écrivaine, celui de son fils Louis, auteur-compositeur-interprète de renom, et celui de son petit-fils Matthieu, bien connu pour sa chanson ” Je dis aime “. Or, c’est Andrée Chédid elle-même qui a écrit les paroles de ce qui est plus qu’un ” tube ” à la mode, car il est porteur d’un message émouvant et fort nécessaire dans le monde où nous vivons. Le poème de la grand-mère mis en musique par le petit-fils, quel superbe exemple du ” pont ” que l’écrivaine s’est de tout temps attachée à établir entre les générations!